Commentaire
Le PS genevois crache au visage de celles et ceux qu'il prétend défendre

Des membres d'Ensemble à Gauche, du Parti socialiste et du Centre veulent faire bénéficier les Genevoises d'un rabais de 20% sur les entrées des lieux culturels et sportifs. Qu'importe leurs revenus. C'est un signe de plus: le PS tourne le dos aux classes populaires.
Publié: 08.02.2022 à 19:19 heures
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Dernière mise à jour: 09.02.2022 à 15:33 heures
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Antoine HürlimannResponsable du pôle News et Enquêtes

Petite scène quotidienne du monde «progressiste» genevois: une multimillionnaire se présente à la caisse d’une salle de concert. Au moment de payer son entrée — une cacahuète par rapport à ses moyens —, elle se voit offrir un rabais de 20% avec les remerciements de la Ville. Une vision que n’oserait même pas avoir un Christian Lüscher sous acide.

Mais les Genevoises bénéficieront peut-être bel et bien d’une réduction de 20% sur les entrées des lieux culturels et des centres sportifs de la cité de Calvin. Une ristourne financée par les contribuables, dont font aussi partie les hommes à petit revenu, bien que mis au ban par cette proposition discriminante.

C’est à plusieurs personnalités d’Ensemble à gauche, du Parti socialiste et du Centre que l’on doit ce projet déposé en 2019. Certaines ne siègent plus et ne verront donc pas les suites que le Conseil municipal (législatif) devrait y donner ce mardi 8 février. Quel dommage, elles manqueront l’occasion de se prendre une nouvelle veste méritée.

Nul doute que plusieurs élues et élus tenteront de tuer ce projet dans l’œuf en rappelant que la culture est avant tout une affaire de classes sociales. D’autres, plus espiègles, ne manqueront pas de souligner que s’attaquer à l’inégalité salariale entre les hommes et les femmes est un combat essentiel (car c’est apparemment l’objectif des motionnaires).

Mais, quitte à s’asseoir sur la Constitution qui prévoit que «nul ne doit subir de discrimination du fait notamment de son origine, de sa race, de son sexe, de son âge, de sa langue», pourquoi instaurer ce cadeau genré au théâtre mais pas au supermarché? Au stade de foot mais pas à la pharmacie? À l’opéra mais pas à l’office des poursuites?

Il était une fois la lutte finale

L’électorat ne sera pas surpris de voir Ensemble à gauche à la manœuvre. Il pardonnera au Centre qui, en voulant exister à tout prix, finira toutefois par se casser les dents s’il continue de sauter sans intelligence sur tout ce qui fait du bruit médiatique. Mais le Parti socialiste doit absolument renouer avec son histoire avant qu’il ne soit trop tard.

À force de segmenter les classes populaires, et même de leur tourner le dos comme dans le cas d’espèce, le parti à la rose crache au visage de celles et ceux qu’il prétend défendre. En estimant que la capacité financière des personnes est moins déterminante que d’autres discriminations insupportables, les socialistes confortent la droite bourgeoise qui martèle à tort et à travers que la lutte des classes est une théorie éculée.

Les conséquences de cet inquiétant glissement sont prévisibles. Et plus facilement encore au bout du Léman, où les camarades genevois n’ont qu’à lever les yeux pour contempler le champ de ruines qu’est devenue leur famille politique de l’autre côté de la frontière.

Alors, Mesdames et Messieurs les socialistes, si vous ne voulez pas qu’à la fin votre seul fait d’armes — à l’instar d’Anne Hidalgo — soit d’avoir préfacé le dernier bouquin du syndic de Lausanne, arrêtez d’insulter votre raison d’être!

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