Comme partout ailleurs, le Conseil d’Etat vaudois mène une politique profondément antisociale. Alors que les salaires réels reculent depuis plusieurs années et que les primes maladie continuent d’exploser, il veut prélever une «contribution de crise» sur les salaires de 0,7%. Dans le même temps, il s’attaque aux prestations publiques. Personne ne serait épargné, même pas les résident·e·s des EMS, qui subiraient une baisse de la qualité des repas et des animations!
Le prétexte avancé est connu: les finances publiques iraient mal et le problème ne serait pas celui des recettes, mais des dépenses. C’est du baratin.
- Le canton de Vaud bénéficie d’une situation financière très favorable: une dette d’environ 500 millions, pour un PIB de 72,4 milliards, soit un taux d’endettement inférieur à 0,7%. Sans oublier une fortune qui se chiffre en milliards.
- Les déficits actuels découlent des cadeaux fiscaux offerts aux grands patrons et actionnaires. L’ancien ministre des Finances, Pascal Broulis, le reconnaissait lui-même: «Au bout de dix ans, nous avons baissé l’impôt pour les entreprises de 3 milliards au total» (L’Agefi, 10 juin 2022).
Cinquième journée de grève
Derrière le vernis technocratique, la réalité est limpide: la politique du Conseil d’Etat sert les intérêts des possédant-e-s. Si son objectif était réellement de renflouer les caisses publiques, il lui suffirait de réclamer à l’infime minorité de grands patrons et actionnaires ayant profité de la non-application de la loi sur le «bouclier fiscal» – entre 0,22% et 0,77% des contribuables selon les années – le remboursement de ce cadeau illégal. On ne parle pas de broutilles, mais d’un cadeau à hauteur, au bas de mot, d’un demi-milliard de francs!
Les salarié-e-s du secteur public et du parapublic ne se laissent toutefois pas faire. Leur mobilisation est exceptionnelle. Ce jeudi 4 décembre marque leur cinquième journée de grève. Et à deux reprises déjà, plus de 25’000 personnes ont manifesté dans les rues. C’est du jamais vu.
Liberté syndicale bafouée?
Cette lutte est particulièrement significative. La Suisse est en effet connue, loin à la ronde, comme le pays de la «paix du travail» et des «syndicats pragmatiques», pour reprendre la formule de Nick Hayek, le directeur général du groupe Swatch. Nous en payons d’ailleurs le prix.
Dans quel autre pays industrialisé la revendication fondatrice du mouvement ouvrier – la journée de 8 heures – n’est-elle toujours pas réalisée, même dans la fonction publique, à l’image du canton de Vaud? Où est-ce que la liberté syndicale est bafouée à tel point qu’un-e représentant-e du personnel peut être licencié-e pour une simple pétition, sans possibilité d’annulation par la justice?
Les travailleurs-euses du secteur public et du parapublic du canton de Vaud montrent qu’une autre voie est possible. Si l’on veut faire face aux attaques patronales, ce qui est décisif, c’est que le camp des salarié-e-s prenne en main son destin et devienne un sujet social actif.
Rien n’est plus puissant que l’auto-organisation et la mobilisation collectives; toute autre approche, en revanche, nous condamne à subir une défaite après l’autre. De plus, la grève, quel que soit son résultat immédiat, stimule la solidarité entre les collègues de travail, dissipe la peur, révèle la nature des rapports sociaux et forge l’expérience pratique de l’action collective; la conscience ne tombe pas du ciel, elle vient en luttant.
Bref, la mobilisation des salarié-e-s du secteur public et du parapublic vaudois est un signal fort – un exemple à suivre, dans le public comme dans le privé!