Une petit game, anyone? J'ai un nouveau jeu en early access, on va farm des golds, montrer notre skill à tous ces noobs. Ça a l'air cool j'ai vu ça sur le Twitch d'un streamer! Vous n'avez rien compris? Si vous n'êtes pas un gamer, c'est normal.
Le monde du jeu vidéo est truffé de jargon et d'anglicismes. Et c'est justement pour y remédier qu'un rapport de la Commission d’enrichissement de la langue française vient de proposer dans le Journal officiel français une liste d'anglicismes à bannir en faveur d'expressions écrites dans la langue de Molière.
Les anglicismes peuvent être «une barrière pour la diffusion et la compréhension par les non-pratiquants», a expliqué lundi à l'AFP le ministère de la Culture, partie prenante de la Commission d'enrichissement de la langue française.
En plus de la difficulté «technique» posée par ce jargon réservé aux initiés, le ministère pointe un risque d'incompréhension «pour ceux qui n'ont pas une pratique de l'anglais courante».
Il s'agit donc d'être davantage inclusif. L'idée est bienvenue mais là où le bât blesse, c'est que sacrebleu, certaines de ces propositions sont - pardon my french! - totalement fucked up.
Adieu eSport
Regardons de plus près. Certains anglicismes trouvent facilement leur équivalent en français comme le terme «pro-gamer», changé en «joueur professionnel» (pourquoi pas «pro-joueur»? c'eût été mieux à mon humble avis). Même chose pour le «season pass», sésame payant pour obtenir du contenu supplémentaire, devenu le «passe saisonnier».
L'aérien «jeu vidéo en nuage» doit lui se substituer au «cloud gaming», service permettant de jouer à distance sans téléchargement complet des fichiers du jeu.
Pour «free-to-play», il faudra désormais dire «jeu en accès gratuit» (pourquoi pas un jeu gratuit tout simplement?) et «jeu vidéo de compétition» devient la version francisée d'«eSport».
D'autres traductions sont moins heureuses. La liste suggère ainsi de remplacer le mot «streamer», désignant une personne qui diffuse ses parties en temps réel, par «joueur-animateur en direct». Du bon gros lourdingue dont la probabilité d'être adopté est proche du néant.
Certaines traductions sont carrément à côté de la plaque: le «game as a service» devient «logiciel à la demande». Or il n'y a rien «à la demande» là-dedans: les game as a service (ou GaaS) désignent des jeux qui monétisent tout ou une partie de leur contenu (ajouts cosmétiques, niveaux supplémentaires etc.), soit par des abonnements, soit par une boutique en ligne.
Allez, on vous en remet une petite sélection, avec du bon et du moins bon:
Anglicisme | Nouveau terme en français |
Matchmaking | Appariement de joueurs |
Retro gaming | Rétrojeu |
Pro-gamer | Joueur professionnel |
Skin betting | Bourse d'objets virtuels |
Pay-to-win | Payer pour gagner |
DLC | Extension téléchargeable |
À noter que la police ne va pas débarquer amender les contrevenants suppôts de la perfide Albion: cette liste est à l'usage – obligatoire – pour «les agents des services publics» français, et les textes «réglementaires», a précisé le ministère de la Culture. Reste à voir si l'usage suivra, ou bien si on se dirige vers un bon gros fail, pardon un échec cuisant.