Les parlementaires LR ont affiché samedi leurs divergences sur la participation de leur parti au gouvernement de Sébastien Lecornu, les sénateurs se rangeant pour la plupart derrière Bruno Retailleau qui s'y oppose, tandis que les députés, menacés par une dissolution, y sont largement favorables.
«Ma conviction, c'est qu'il ne faut pas participer», a affirmé le ministre de l'Intérieur démissionnaire lors d'une réunion samedi matin en visio avec les parlementaires LR, avant une autre commencée samedi à 11H00 du bureau politique, instance décisionnelle du parti.
«Participer, c'est le dernier acte d'une dissolution dans le macronisme», a prévenu le patron des Républicains, au lendemain de la décision d'Emmanuel Macron de renommer Sébastien Lecornu à Matignon, assurant que lui-même «n'ira pas dans ce gouvernement».
«Du chantage à la censure»
Bruno Retailleau avait été reconduit il y a une semaine dans le premier gouvernement de Sébastien Lecornu avant de déclencher sa chute quelques heures plus tard, en estimant dans un message sur X que la composition de son exécutif ne reflétait pas la «rupture» annoncée et en pointant tout particulièrement la nomination du macroniste Bruno Le Maire à la Défense. Le patron des Républicains a reçu le soutien du président LR du Sénat Gérard Garcher lors de la réunion avec les parlementaires.
Le patron des Républicains a reçu le soutien du président LR du Sénat, Gérard Larcher, lors de la réunion avec les parlementaires. Le PS «va faire du chantage à la censure et le prochain gouvernement devra renoncer à tout: le sérieux budgétaire, le régalien, la défense du travail», a-t-il prévenu. «Je ne pense pas qu'il faille participer à ce gouvernement», a conclu Gérard Larcher. L'eurodéputé François-Xavier Bellamy, également vice-président de LR, a aussi pris position contre la participation.
Lors de la réunion du bureau politique, le patron des sénateurs LR Mathieu Darnaud s'est dit favorable à «un soutien sans participation» au gouvernement Lecornu, assurant s'exprimer au nom de son groupe. Tout comme les jeunes LR, opposés à ce que l'équipe Lecornu 2 comprenne des ministres de leur parti.
Soutien «quasi unanime»
A l'inverse, de nombreux députés ont pris la parole pour soutenir Sébastien Lecornu et défendre le maintien de LR au sein de l'exécutif, à l'image du porte-parole de leur groupe Vincent Jeanbrun. «On n'est pas le RN ni LFI, on ne fait pas tomber les gouvernements», a-t-il affirmé. Le patron des députés LR, Laurent Wauquiez, a rappelé la position «quasi unanime» des députés de droite «de rester du côté de la responsabilité».
Soulignant qu'il y a une semaine, il s'était opposé à l'entrée de LR dans le premier gouvernement de Sébastien Lecornu sans connaître sa feuille de route, contrairement à son rival interne Bruno Retailleau, Laurent Wauquiez a souhaité que le parti soit «dans le collectif» et plaidé pour «l'unité».
Dans la nuit de vendredi à samedi, le groupe des députés LR avait apporté un très large soutien à Sébastien Lecornu, sans prendre position sur la participation au gouvernement. Avec une cinquantaine d'élus, les députés du parti issue du gaullisme occupent une position de pivot à l'Assemblée nationale et constituent aux côtés du bloc macroniste la deuxième composante du «socle commun».
«Je reste sur la ligne d'un soutien très clair au gouvernement. La participation peut être conditionnelle», a estimé l'ex-Premier ministre Michel Barnier, fraîchement élu à l'Assemblée. Après la dissolution l'an dernier, de nombreux députés LR avaient sauvé leur siège face au RN dans des circonscriptions rurales, en grande partie grâce à leur ancrage local.
La menace d'une dissolution
Beaucoup ne se sentent pas redevable au parti, dont le nom ne figurait souvent pas sur les affiches électorales, et craignent de ne pouvoir contenir une nouvelle poussée de l'extrême droite en cas de législatives anticipées.
«On ne peut pas claquer la porte après avoir défendu des positions de responsabilité», s'est exclamé Sébastien Martin (Saône-et-Loire), tandis que Julien Dive, proche de Xavier Bertrand et seul député non-RN de l'Aisne, a estimé que «sans participation, il n'y a pas de gouvernement».
«Il faut que ce gouvernement tienne, sinon il n'y aura pas de budget et une dissolution», a mis en garde Annie Genevard, ministre de l'Agriculture démissionnaire.