Fausse vidéo diffusée
Macron renversé par un coup d'Etat? L'Elysée accuse Facebook

Une vidéo mensongère réalisée avec l'intelligence artificielle rend Emmanuel Macron furieux. Le président français s'est en est pris violemment à la plateforme pour avoir refusé de retirer ces images qui montrent un soi disant coup d'Etat en France.
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Le président français achèvera son second mandat en mai 2027.
Photo: IMAGO/ABACAPRESS
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Richard WerlyJournaliste Blick

Emmanuel Macron vient-il de déclarer la guerre à Facebook? Une guerre verbale qui réclame, ni plus ni moins, une mobilisation générale contre les pratiques du géant Meta, propriétaire du réseau social et présidé par Mark Zuckerberg. Le motif? Une vidéo mensongère, fabriquée en partie grâce à l’intelligence artificielle, déjà visionnée depuis trois jours par treize millions d’internautes. Elle raconte l’impensable: un coup d'Etat en France. Des militaires dans les rues. Un hélicoptère qui survole Paris. Bref, la fin de la République en images…

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Le président français, toujours au pouvoir jusqu’à la fin de son second mandat en mai 2027 (pour ceux qui auraient vu cette vidéo et seraient tentés de croire le contraire), a révélé la diffusion de ce petit film voici deux jours, lors d’une intervention devant la presse. Mais sa colère a explosé mercredi 17 décembre, sans rien cacher de son irritation, lorsque ses services lui ont répondu que Facebook refusait de retirer cette séquence, au motif qu’elle n’enfreignait pas ses règles de diffusion.

Une fausse journaliste

Le fait que l’on voie, dans ce petit film, une journaliste d’une supposée chaîne internationale «Live 24» et que la «chute de Macron» soit annoncée en direct, renversé par un officier resté anonyme, n’a pas ébranlé Facebook dans un premier temps. Tout est grossièrement réalisé. Tout semble faux. Et pourtant, selon Macron, ces images ont été prises au sérieux, notamment en Afrique, où elles ont été confectionnées.

Retour sur les événements qui ont mis le président français en fureur, à un an et demi de la prochaine élection présidentielle et à la veille d’un sommet européen à Bruxelles qui s’annonce particulièrement périlleux pour lui, à la fois défenseur de l’Ukraine et adversaire de l’accord commercial avec le Mercosur, ce qui l’oblige à négocier en coulisses, notamment avec la Hongrie de Viktor Orbán.

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Les quatre étapes du fake

Etape 1: selon le locataire de l'Elysée, un dirigeant africain lui téléphone en début de semaine pour lui témoigner son inquiétude devant les «événements parisiens».
Etape 2: plutôt que de démentir officiellement un «fake», le président français choisit de demander à ses services de contacter Facebook pour supprimer cette vidéo et en rester là.
Etape 3: refus, dans un premier temps, du géant américain, qui n’y voit rien de répréhensible, car aucune violence ni aucun acte criminel de droit commun n’y sont montrés.
Etape 4: Facebook accepte enfin d’enlever la vidéo, qui continue toutefois de circuler sur d’autres réseaux sociaux, et Macron explose de colère.

Retour, surtout, sur les conditions de fabrication de ce «fake». Il vient d’Afrique, et plus particulièrement du Burkina Faso, un pays devenu très antifrançais après avoir été longtemps un pilier de la «Françafrique». Une junte militaire y est au pouvoir depuis 2022 et vient, par exemple, de rétablir la peine de mort. C’est un étudiant burkinabè qui a fabriqué cette vidéo. Ironie de l’histoire: c’est à Ouagadougou, la capitale du Burkina, que Macron avait, en novembre 2017, défrayé la chronique lors d’un de ses premiers voyages africains. Il avait alors plaisanté sur le président burkinabè de l’époque, Roch Kaboré, en rigolant devant des étudiants qui se plaignaient de la chaleur: «Il est parti réparer la climatisation.»

Dans les entrailles de Facebook

Selon les médias français, qui se sont lancés sur les traces numériques de cette vidéo, tout vient d’une page Facebook nommée «Islam», dont le contenu n’a rien à voir avec la religion. Son auteur ne précise pas qu’elle est générée par intelligence artificielle (IA). La mention «contenu créé par IA» a été ajoutée par Facebook avant que la vidéo ne soit supprimée. 

Selon l’AFP, «sur le même profil, on retrouvait d’autres vidéos prétendant montrer des coups d’Etat fictifs en France. Au total, ces vidéos concernant la France et générées par IA cumulaient près de 17 millions de vues. Elles mettent souvent en scène de faux journalistes et de faux médias, certaines d’entre elles utilisant le véritable logo de la chaîne RFI.»

Fait le plus problématique selon Emmanuel Macron, ardent défenseur de la souveraineté numérique européenne face aux Etats-Unis: le retrait de Facebook est intervenu parce que l’auteur du film incriminé l’a lui-même supprimé. «Ils ont répondu à mes services: 'Ça ne contrevient pas à nos règles d’utilisation.' Refus de retrait. Ces gens-là se moquent de nous. Ils se foutent de la sérénité des débats publics et, donc, ils nous mettent en danger.»

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