La députée socialiste Céline Thiébault-Martinez a déposé lundi à l'Assemblée nationale une proposition de «loi intégrale de lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants».
Déposé à la veille de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, ce texte s'inspire des 140 recommandations formulées il y un an par la «coalition féministe pour une loi intégrale» qui regroupe quelques dizaines d'organisations. Il reprend aussi des préconisations de la Commission sur les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise). Il entend lutter contre une «impunité» persistante des violences sexuelles et sexistes, «nourrie par un manque criant de moyens», un «déficit de protection» et une «formation insuffisante des professionnels».
«Limiter les classements sans suite»
Les violences sont «massives, systémiques et largement impunies» et «exigent une loi cadre qui embrasse l'ensemble du problème», a déclaré la députée lors d'une conférence de presse avec les associations qui ont co-construit le texte. «Il faut en finir avec le pointillisme législatif, composé de mini-propositions de loi, dégainées à chaque nouvelle affaire qui secoue l'opinion publique«, a-t-elle poursuivi.
Le texte prévoit 78 mesures couvrant la justice et la police, la protection des enfants, la santé, le travail et la lutte contre les cyberviolences. Il veut «réformer la police et la justice» pour «mieux protéger les victimes»: création d'une juridiction spécialisée, un «juge des violences sexistes et sexuelles», formation obligatoire des professionnels et encadrement des experts judiciaires. Il entend définir «un socle obligatoire d'actes d'enquêtes pour limiter les classements sans suite».
Les enfants ne sont pas oubliés
Un second volet concerne les enfants: «entretien annuel pour chaque enfant» pour dépister des violences, «renforcement de la sécurité du parent protecteur», accompagnement systématique de l'enfant par un avocat, parcours de soins coordonné.
Il prévoit «l'interdiction pour toute personne condamnée pour violences sexuelles d'exercer une activité, bénévole ou rémunérée, impliquant un contact avec un mineur». Le volet santé prévoit la «formation obligatoire» des soignants et la lutte contre les «violences obstétricales et gynécologiques». Le texte veut octroyer aux migrantes victimes de violences une protection renforcée: interdiction d'OQTF, titre de séjour de deux ans, garantie d'un logement adapté.
Texte soutenu par 109 députés
La députée a sollicité le soutien de tous les groupes, sauf le Rassemblement national (RN) et l'Union des droites pour la République (UDR) d'Eric Ciotti. Le texte est soutenu par 109 députés principalement socialistes (69) écologistes (18) et Modem (10), et quelques députés des groupes Ensemble pour la République (4) et Horizons (2), GDR (communistes, 3), Liot (2) et droite républicaine (1).
Relevant qu'il est peu probable qu'une proposition de loi de cette ampleur soit inscrite à l'ordre du jour, Céline Thiébault-Martinez espère que certains articles seront repris dans des propositions de loi de groupes dans leurs niches parlementaires ou par le gouvernement. La ministre déléguée chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes Aurore Bergé travaille de son côté sur un projet de loi-cadre sur les violences faites aux femmes.