La police française a eu beaucoup de travail cette semaine. Entre le lundi 20 mai et le jeudi 22 mai, 55 hommes ont été interpellés dans le cadre d’une vaste opération visant à démanteler un réseau de pédocriminalité.
D'après un article de «Libération» paru ce 22 mai, l'enquête, menée depuis dix mois, a révélé que les suspects utilisaient la messagerie cryptée Telegram pour échanger du contenu pédopornographique. Les arrestations ont eu lieu dans 42 départements, pour des faits de détention, diffusion ou consultation régulière de contenus impliquant des enfants de moins de 10 ans.
Leur plateforme privilégiée
Les personnes arrêtées, âgés de 25 à 75 ans, viennent de milieux très divers: un prêtre, un ambulancier, un professeur de musique ou encore plusieurs hommes décrits comme de «bons pères de famille». D’après l'Office central des mineurs (Ofmin), ces personnes étaient régulièrement en contact avec des pédocriminels «extrêmement dangereux» incarcérés depuis l’été dernier.
Pour Quentin Bevan, chef du pôle opérationnel de l’Ofmin, Telegram reste la plateforme privilégiée des pédocriminels. S’il reconnaît des progrès dans la coopération avec la plateforme avec les enquêteurs depuis l’interpellation en août dernier de son patron, Pavel Durov, il considère qu'elle remplit à peine le minimum de ses obligations légales dans ce domaine.
Dans une déclaration à l'AFP, Telegram a assuré avoir «toujours respecté les lois de l'Union européenne, y compris le Digital Services Act», et avoir «systématiquement répondu à toutes les demandes judiciaires contraignantes depuis des années».
Des mots, pas des actes?
Ces 55 hommes, qui ont des antécédents de pédopornographie, sont en contact avec des enfants, soit parce qu'ils ont des enfants ou des petits-enfants, soit qu'ils côtoient des enfants de par leur profession. Pour certains d'entre eux, a-t-il ajouté, des «comparutions immédiates ont déjà eu lieu», pour d'autres, «les enquêtes seront longues pour matérialiser les faits».
Ainsi, selon un enquêteur, des mis en cause, qui se vantaient d'abuser d'enfants pendant leur sommeil, affirment ne pas être passés à l'acte. Un autre, niant tout acte délictuel, ne parvient pas à expliquer pourquoi il a acheté un string à une fillette de 8 ans de son entourage, poursuit cet enquêteur.
Les interpellations ont eu lieu dans 42 départements, a minima pour détention, diffusion, et consultation habituelle de contenus pédopornographiques concernant des enfants de «moins de dix ans». Quarante-deux parquets sont concernés, le dossier n'ayant pas été centralisé à ce stade.
Cette vaste opération a eu pour point de départ l'arrestation l'été dernier par les policiers de l'Ofmin de pédocriminels qui agressaient des enfants et mettaient en ligne leurs méfaits sur Telegram. Ils sont mis en examen notamment pour traite d'êtres humains et encourent la perpétuité.
Garde à vue de Pavel Durov
Depuis l'arrestation spectaculaire de Pavel Durov à sa descente d'avion en vertu d'un mandat de recherche émis par des enquêteurs de l'Ofmin, l'Office a acquis une notoriété mondiale et son expertise dans la lutte contre la pédocriminalité est reconnue.
Le milliardaire russe de 40 ans, naturalisé Français en 2021, a été mis en examen fin août dernier pour une litanie d'infractions relevant de la criminalité organisée, la justice lui reprochant globalement de ne pas agir contre la diffusion de contenus criminels sur la messagerie.
Il est l'objet d'un contrôle judiciaire strict qui lui interdit de quitter la France sans autorisation des autorités. La justice a d'ailleurs récemment refusé d'accéder à sa demande de se rendre pour raisons professionnelles aux Etats-Unis, au motif que ce déplacement n'apparaissait «pas impérieux ni justifié».