Les pommes trônent toute l'année en bonne place aux rayons fruits et légumes. Mais en ce début d'automne, c'est carrément l'invasion. Comme le pauvre Isaac Newton, on n'échappe pas à ces fruits qui tombent des branches juste après l'été. Alors on se dirige forcément vers les étals, et on en remplit son sac pour préparer des desserts, des salades ou tout simplement pour les croquer dans leur plus simple appareil.
Lesquelles choisir? Avouez que la question n'est pas si facile. Cox, Granny Smith, Golden Gala… Il y a pléthore de variétés, chacune avec des couleurs, des consistances, des saveurs différentes. Choisir la mauvaise transformera la tarte de vos rêves en une créature de cauchemar. Et pensez aux quolibets de vos convives…
La Golden fait un tabac
Thomas Marie, le boulanger qui œuvre au Bread Store à Vevey et Lausanne, en passe à la louche «150 kilos par semaine en ce moment». Tatins, tartes fines, tartes bonne maman et bien sûr les chaussons aux pommes: tous les desserts y ont droit. Pour ce Meilleur ouvrier de France, la Golden (la jaune) reste une pomme de choix. «C'est une pomme facile à utiliser, son rapport eau/fibres fait qu'elle se tient bien à la cuisson. Et puis elle est généralement de gros calibre, c'est parfait pour l'aspect visuel quand on s'en sert pour la décoration, d'autant que sa chair ne brunit pas trop par oxydation. C'est un choix simple, mais quand nous essayons d'autres variétés, nous avons toujours des ennuis.»
Surprenant, car je pensais jusqu'ici que la Golden - une variété américaine, parmi les plus cultivées au monde - était plutôt inintéressante, trop d'eau, pas assez de saveur. Mais cette pomme est également la préférée de Valentin Hofmann, le chef gérant de l'école Ateliers by Serge Labrosse, à Genève: «La Golden est légèrement farineuse, c'est parfait pour la cuisson.» Du côté du chef Pierre Hermé, la Cox orange est sa préférée, glisse Thomas Marie.
Osez mélanger
Après avoir parcouru mes livres de recettes, je constate qu'il n'est pas rare de se voir recommander de mixer les variétés. Vertes, peu sucrées et bien acidulées, les Granny Smith donnent d'élégantes lamelles très fines, une fois le fruit passé à la mandoline. Elles sont parfaites pour les tartes décorées avec des tranches de pommes, d'autant que leur acidité apporte une fraîcheur intéressante. Essayez de les mélanger avec des Gala, plus sucrées et moins croquantes, et vous obtiendrez un contraste intéressant.
Pour les tartes tatin, Valentin Hofmann recommande quant à lui «un mix de Golden et de Gala», à la peau rouge clair, «de magnifiques pommes qu'on vient d'aller chercher à Aubonne».
Enfin, pendant que vous regardez silencieusement l'étalage, gardez un œil sur de nouvelles variétés, par exemple la Kissabel, une nouvelle pomme apparue en France, aussi cultivée en Suisse, qui a la particularité d'avoir une chair rouge, signale Thomas Marie. On les trouve chez Coop, entre autres.
Mollo sur la cannelle
Bon, vous avez vos pommes, bravo. Mais attention à ne pas tout gâcher en cuisine en les cuisant n'importe comment.
D'abord, la peau, on en fait quoi? Pour Thomas Marie, «tout dépend de l'épaisseur», certaines variétés ayant des peaux bien plus coriaces que d'autres. Elles peuvent amener une texture et des tannins intéressants, mais elles ne doivent pas gêner lors de la dégustation. Vous hésitez? Alors coupez la poire en deux - je veux dire par là, épluchez la moitié de vos fruits seulement.
Autre conseil important, allez-y mollo sur la cannelle, une épice puissante qui trop souvent écrabouille les subtiles saveurs des pommes. Ce sont elles les stars, pas la cannelle! Une toute petite pincée suffit.
Pomme, j'aurai ta peau
Et que faire des épluchures? Donnez-les aux poules. Vous n'en avez pas? Voici deux astuces données par nos deux chefs. En bon boulanger, Thomas Marie assure qu'elles constituent une bonne base pour démarrer un levain: laissez macérer les épluchures dans de l'eau avec une cuillère de miel, et ajoutez de la farine après 2 à 3 jours, et c'est parti pour la fermentation.
Valentin Hofman, lui, suggère une fermentation sèche: «Placez dans un sac, de préférence sous vide, les épluchures et les trognons avec 2% de leur poids en sel et laissez fermenter à température ambiante. Après 7 à 10 jours, récupérez le jus de dégorgement ainsi formé: vous pouvez l'utiliser dans une vinaigrette, parfaite pour assaisonner une salade de rampons avec du gruyère fruité».
Pour finir, on vous propose une recette hyper simple de pommes au four à réaliser avec des Canada ou des Boskoop. Elles sont délicieuses avec une noisette de beurre fondu, ou si vous voulez plus de gourmandise, avec une petite farce aux fruits secs, on vous explique tout ici!