La Commission européenne a présenté mardi une série de mesures pour réhabiliter la titrisation, un procédé accusé d'avoir déclenché la crise financière de 2008 mais qui pourrait aujourd'hui aider à relancer l'investissement dans l'UE. La titrisation consiste à regrouper des crédits bancaires pour les transformer en actifs destinés à être vendus en «tranches» sur les marchés financiers.
Objectif: sortir ces créances du bilan des banques pour leur permettre d'accorder de nouveaux crédits. Pour les investisseurs, ces actifs souvent plus risqués peuvent s'avérer très rémunérateurs. A la fin des années 2000, ces instruments ont cependant été discrédités après avoir disséminé sur les marchés des crédits immobiliers risqués dits «subprime», accordés à des ménages peu solvables, qui ont mené à la pire crise financière depuis 1929.
Abaisser certaines exigences
La Commission a proposé mardi un assouplissement du cadre réglementaire européen dont le durcissement après la crise a entraîné un fort recul du recours à ces outils dans l'UE.
«La titrisation est un instrument utile pour générer des financements supplémentaires en faveur des ménages et des entreprises», a expliqué la commissaire européenne aux Services financiers, Maria Luis Albuquerque. Elle a affirmé que l'assouplissement proposé allait relancer ce marché «tout en préservant des garanties solides pour la stabilité financière».
La Commission propose d'abaisser certaines exigences réglementaires afin de réduire les coûts pour les émetteurs et les investisseurs, notamment en simplifiant certaines obligations de transparence et de vérifications. Elle propose aussi d'assouplir les niveaux de fonds propres imposés dans le cadre de l'exposition à la titrisation, en les liant au niveau de risque encouru. Certaines règles représentaient un «fardeau excessif» qui freinait le marché, avance la Commission.
Libérer du cash
En libérant du cash au sein des banques, ces outils pourraient contribuer à financer les besoins d'investissements gigantesques dans la défense, l'économie numérique et la transition verte. «Nous libérons des capitaux pour les banques qui pourront ainsi prêter davantage», a expliqué un fonctionnaire de la Commission, tout en reconnaissant que l'institution ne disposait pas de prévision chiffrée du surplus d'emprunts espéré. Ce responsable a balayé le risque d'une nouvelle crise des «subprimes» liée au recours à la titrisation en Europe.
«Il y a très peu de crédits hypothécaires risqués dans l'UE, les règles sur les prêts sont plus strictes» qu'aux Etats-Unis et la titrisation européenne ne portera que sur des «emprunts solides», a-t-il affirmé. Ces propositions doivent encore être négociées avec le Parlement européen et les Etats membres. Cet assouplissement était réclamé par plusieurs pays de l'UE dont la France et l'Allemagne qui cherchent à renforcer leur secteur bancaire. Il figurait aussi parmi les propositions de l'ancien président de la Banque centrale européenne (BCE), Mario Draghi, dans un rapport très médiatisé à l'automne dernier.