Plusieurs joueurs racontent
Passer de Lausanne à Genève (ou l'inverse) n'a rien d'anodin

Ce mardi soir, le derby entre Lausanne et Genève va forcément déchaîner les passions. Samedi, Tim Bozon a été chahuté par les fans du GSHC pour son passé chez les Lions. Est-ce vraiment possible de passer d'un club à l'autre? Témoignages.
Publié: 07:46 heures
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Dernière mise à jour: 07:47 heures
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Les derbies entre Lausanne et Genève sont des matches particuliers.
Photo: keystone-sda.ch

Samedi soir, certains supporters de Genève-Servette ont rappelé à Tim Bozon qu'il lui faudrait du temps - et probablement quelques buts - pour qu'ils oublient d'où il vient. Le Français à licence suisse a porté le maillot du Lausanne HC. Homme entier, il a tout donné pour ses couleurs jusqu'au dernier moment. Logique. Mais il y a même ajouté une touche personnelle en ornant ses patins d'image à l'effigie des ultras vaudois. Un geste qui a mal passé au bout du Léman.

Le soir-même, Tim Bozon plantait deux buts et commençait ainsi son processus de rédemption aux yeux de ceux qui peinaient à voir un joueur autant attaché à Lausanne les rejoindre. «Ce ne sont pas des trucs qui m'atteignent, a-t-il précisé après la rencontre. Les gens font et pensent ce qu'ils veulent. Moi, je suis un joueur de hockey, employé par une organisation pour jouer au hockey et marquer des buts. Pour rester poli, ce qui se passe à côté, je n'en ai rien à f… Je veux aller en finale et soulever la coupe, le reste ne m'importe pas.»

Pas le premier… ni le dernier

Pourtant le passage d'un club lémanique à l'autre n'est pas une anomalie dans le paysage. Ils sont nombreux à avoir pris l'autoroute A1 pour changer d'employeur. «Je me souviens trop bien de mon premier match à Lausanne avec le maillot du LHC, rigole Cody Almond. Il s'agissait de l'ouverture de la Vaudoise aréna et Tommy Wingels avait marqué après une dizaine de secondes.» Sa nouvelle équipe s'était inclinée 3-5. «J'avais livré un bon match et j'avais même marqué un but, se souvient-il. Mais je savais qu'il faudrait du temps pour que je sois vraiment accepté pour qui je suis et non pas comme l'ancien joueur du GSHC.»

Au moment de s'engager avec le rival vaudois, le Canado-Suisse savait dans quoi il s'embarquait après avoir joué durant sept ans aux Vernets. «Mais j'étais à un stade différent de ma carrière, précise-t-il. Ma femme vient de Lausanne et c'était également une décision familiale. Mais je pense qu'il m'a fallu deux années pour être réellement accepté.» Pourquoi si long? «Le Covid, souffle-t-il. Après quelques mois de championnat, nous avons joué à huis clos. Cela ne m'a pas forcément aidé à créer un lien avec les fans lausannois alors que c'était quelque chose qui me tenait à cœur.»

À Genève, Cody Almond était vraiment apprécié. «Je crois que durant ma carrière, les fans préféraient m'avoir dans leur équipe que face à eux, rigole-t-il. Mon style de jeu agressif y était sûrement pour quelque chose. Mais mon retour aux Vernets s'est bien déroulé. J'avais un sentiment magnifique de jouer là-bas. Les gens ont toujours été gentils avec moi malgré mon départ. C'est une des plus belles marques d'affection que l'on peut me donner. Même si je suis parti chez le club rival, on m'a toujours respecté. Cela m'a beaucoup touché.»

Le transfert de Joël Vermin

L'été suivant, l'autoroute A1 a été plus fréquentée que d'habitude. La «faute» à un échange de joueurs surprenant entre les deux clubs. Joël Vermin est parti à l'ouest, tandis que Tim Bozon (déjà lui), Floran Douay et Guillaume Maillard faisaient le chemin inverse. Une histoire extra-sportive a mené à ces changements d'adresse. Floran Douay se souvient bien de cette journée où il a troqué son Aigle pour un Lion. «Je n'ai pas eu mon mot à dire, remarque-t-il. Et c'est probablement aussi pour cela que cela s'est bien passé. Je n'ai pas ressenti la moindre animosité d'un côté ou de l'autre.»

La grosse différence, pour lui, c'est que son statut de joueur établi aux Vernets a volé en éclats sitôt la porte de la Vaudoise aréna franchie. «Mais en ce qui concerne l'animosité entre les deux clubs, rien à signaler pour ma part.» Il avoue avoir vécu bien pire lors des derbies tessinois. «Quand tu joues à Ambri, tu ne vas pas boire un verre à Lugano sous peine d'avoir des soucis. Là-bas, ce sont des tensions d'un tout autre niveau.»

«Il y avait un rapport hiérarchique»

Ces relations valdo-genevoises ont également eu un rapport largement moins conflictuel, bien qu'éloigné des excès tessinois. C'était à la fin des années 2000 et au début des années 2010. À cette époque, l'équipe des Vernets aidait de manière plus ou moins discrète l'équipe de Malley. Lors des play-off de 2010, le lien a sauté aux yeux. «On s'en doutait, s'est souvenu Florian Conz. Mais à ce moment, c'était devenu plus clair (rires).»

Que s'est-il passé? «J'ai perdu ma nationalité jurassienne», pouffe l'ancien capitaine du Lausanne HC. Alors joueur du GSHC, il avait été désigné pour renforcer les Lions lors des quarts de finale de play-off de LNB face à... Ajoie. Dans une série mal emmanchée, le LHC avait bénéficié de renforts grenat pour se sortir du piège ajoulot grâce à un tour de passe-passe dont Chris McSorley a le secret (bien aidé par les règlements inimitables de la Ligue). 

S'il a porté les deux maillots, Florian Conz n'a pas vécu ces passages de manière si compliquée. «À l'époque, les deux clubs ne jouaient pas dans la même ligue, précise-t-il. C'était donc plus simple de passer de l'un à l'autre. À Genève, on se voyait comme le grand frère qui donne un coup de main.» Lors des premières années dans l'élite des Vaudois, le rapport n'a pas changé. «Il y avait certes une rivalité, mais elle était saine, poursuit Florian Conz. Le rapport hiérarchique entre les deux clubs était clair et donc la tension moins grande. Les choses ont évolué petit à petit avec le changement de statut lausannois.»

Un joueur à avoir vécu ce changement au fil des années se nomme Benjamin Antonietti. Tout comme son ex-coéquipier, il a rejoint pour la première fois Lausanne en licence B au début des années 2010. «Ce n’était pas un souci à ce moment-là», confirme celui qui, au final, a passé 11 ans entre Malley et la Vaudoise aréna.

«Ils nous appelaient la 2 de Genève»

Après la promotion du LHC, le rapport n’a que peu changé. «Il n’y avait pas de tension puisque nous avions plusieurs anciens grenat. D’ailleurs, les joueurs du GSHC nous appelaient la 2 de Genève», révèle-t-il.

En 2021, lorsqu’il a fait le chemin inverse, le changement commençait gentiment à s'opérer. «Mais contrairement à Tim, il ne s’est rien passé pour mon arrivée, se souvient Benjamin Antonietti. Certains supporters m’avaient fait comprendre que je devais faire mes preuves avant d’être accepté, mais je n’ai jamais eu de souci.»

Depuis plusieurs années, Lausanne n'a pas grand-chose à envier aux Genevois (hormis leur palmarès). Raison pour laquelle la rivalité est plus grande. Et c'est aussi pourquoi les joueurs doivent patiner sur des œufs, surtout s'ils passent d'un club à l'autre, à l'instar de Tim Bozon.

National League 25/26
Équipe
J.
DB.
PT.
1
HC Davos
HC Davos
3
12
9
2
ZSC Lions
ZSC Lions
3
9
9
3
EV Zoug
EV Zoug
3
3
7
3
Genève-Servette HC
Genève-Servette HC
3
3
7
5
Lausanne HC
Lausanne HC
3
4
6
6
Rapperswil-Jona Lakers
Rapperswil-Jona Lakers
3
3
6
7
HC Fribourg-Gottéron
HC Fribourg-Gottéron
3
1
5
8
SCL Tigers
SCL Tigers
3
-2
5
9
HC Ambri-Piotta
HC Ambri-Piotta
3
-3
3
10
EHC Kloten
EHC Kloten
3
-1
3
11
SC Berne
SC Berne
3
-3
2
12
HC Lugano
HC Lugano
3
-6
1
13
EHC Bienne
EHC Bienne
3
-8
0
14
HC Ajoie
HC Ajoie
3
-12
0
Playoffs
Barrages qualificatifs
Barrages de relégation
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