Aleksi Saarela ne portera pas le maillot de Langnau malgré un contrat encore valable pour deux saisons. La raison? Le Finlandais a été rappelé par l'armée de son pays pour effectuer le service militaire. Six mois sous les drapeaux qui ont forcé le club et l'attaquant à rompre le contrat de travail qui les liait. Une situation pour le moins inhabituelle.
Est-ce à dire que les joueurs provenant du pays nordique évoluant en Suisse risquent de devoir repartir en nombre servir leur pays? «Non, coupe Juhu Sintonen, manager de joueurs finlandais établi en Suisse depuis de nombreuses années. Il y a des moyens de faire en sorte qu'une telle situation ne se produise pas. Mais cela demande un minimum de préparation et de travail.»
Un avis que partage Teppo Laaksonen, journaliste finlandais spécialisé dans le hockey sur glace. Sur son compte Twitter (nouvellement X), il détaille: «Il faut dire que c'est vraiment mal géré du côté du «camp Saarela». Deux années de contrat très lucratives en Suisse sont parties en fumée. Saarela a déjà 28 ans, donc il a réussi à éviter le service militaire pendant très longtemps — il y avait certainement moyen de régler ça plus intelligemment, probablement même il y a des années.»
Tensions géopolitiques
Juho Sintonen est un habitué de ce genre de cas et trouve celui-ci particulièrement cocasse: «Aucun de mes clients ne s'est fait arrêter à la douane en rentrant au pays.» Il rigole franchement de cette situation, mais ne dit pas ça par hasard. «Si tu n'as pas fait ton service militaire et le suivi administratif, c'est courant de se faire rattraper au moment où tu rentres au pays. Je ne peux pas citer le nom du joueur, mais un Finlandais ayant évolué en Suisse a dû quitter momentanément son club pour faire des jours de prison pour cette raison.»
Et forcément, l'actualité joue un rôle. «La Finlande a près de 1400 kilomètres de frontière commune avec la Russie, poursuit Juho Sintonen. Il ne faut pas avoir fait de grandes études géopolitiques pour comprendre que la vis va être resserrée par les autorités. Soit tu prends les devants, soit tu te retrouves dans cette situation. Ce qui est surprenant? Son manager est un avocat en Finlande.»
Dans le pays nordique, les sportifs de haut niveau peuvent bénéficier d'un régime de faveur pour faire leur «intti» à savoir le service militaire obligatoire. «Ils ont jusqu'à 29 ans pour effectuer leurs jours. Mais les hockeyeurs, fondeurs ou sauteurs à skis par exemple peuvent le faire en été», détaille Juho Sintonen. Un de ses clients va d'ailleurs faire un passage par la case armée l'an prochain. «Mais cela ne va pas lui poser de problème, car le cas a justement été bien réglé en amont», précise-t-il.
Perte colossale
Aleksi Saarela fêtera ses 29 ans le 7 janvier prochain. Raison pour laquelle il doit absolument entrer en service au 1er juillet afin d'avoir effectué ses six mois avant son anniversaire. Une situation regrettable, mais finalement assez rare.
Concrètement, c'est un manque à gagner immense pour lui. En effet, la Finlande n'offre pas d'assurance perte de gain pour un tel cas. La défense nationale verse une indemnité pour couvrir les frais personnels durant le service de 6,10 euros par jour. Un étranger en Suisse gagne habituellement entre 200'000 et 300'000 francs net. «Je suis tout de même surpris qu'un tel cas arrive, conclut Juho Sintonen. Cela prouve aussi l'importance de travailler avec des gens sérieux.» Le joueur finlandais vient de l'apprendre (chèrement) à ses dépens. «Heureusement que c’est un sportif d’élite et qu’il ne fume pas, sinon il ne pourrait même s’acheter un paquet de cigarettes par jour», rigole notre interlocuteur.