Je n'ai pas peur de l'affirmer: Patrick Fischer est le meilleur sélectionneur de l'histoire du hockey suisse. Voilà, c'est dit.
Maintenant que cette considération tout sauf subjective est mise de côté, posons-nous la question centrale. Pourquoi le technicien est-il le meilleur? C'est largement plus intéressant. Et là, il est possible d'être plus nuancé. D'un côté, le Zougois a le plus beau palmarès d'un entraîneur de l'équipe de Suisse avec trois médailles d'argent. Sous sa direction, la formation helvétique s'est invitée durablement à la table des meilleures nations mondiales et fait aujourd'hui figure de sélection de pointe juste derrière les «monstres» canadiens. Au classement mondial, la Suisse est devant la Suède et les États-Unis. Elle est à égalité de points avec les Tchèques et se situe dans le sillage direct de la Finlande. Ce sont des faits.
Est-ce uniquement de la «faute» de Patrick Fischer? Bien sûr que non. Donnez trois couvercles de casseroles à l'orchestre de Leonard Bernstein et la symphonie aura du cuivre dans l'aile. Un entraîneur ne pourra jamais aller plus loin que ses individualités ne le lui permettent. Par contre, un coach pourrait également aller bien moins loin. Les exemples sont nombreux (si vous en cherchez, regardez du côté de Berne).
Et c'est précisément là tout le génie de Patrick Fischer. Le Zougois a rassemblé toute la Suisse du hockey autour de sa personne. Il a su fédérer les meilleurs joueurs par son entregent et sa volonté de redonner une vraie identité suisse à cette équipe de Suisse qui avait tendance à en manquer par le passer. Entre le moment où il est arrivé — le 3 décembre 2015 - et le moment où il a annoncé son départ — le 3 décembre 2025 -, Patrick Fischer a remis la croix suisse au centre de toutes les préoccupations.
Cela ne s'est pas fait sans mal. Certaines individualités ont été temporairement bannies pour n'avoir pas tiré à la même corde que les autres. Il a su avoir une main de fer pour asseoir son autorité lorsque cela était nécessaire, mais il a surtout su amadouer les stars de NHL. Chaque année, la question de savoir si les Nico Hischier, Kevin Fiala ou Nino Niederreiter allaient être de la partie ne se posait pas. Ils viendront sitôt leur franchise éliminée.
Et c'est peut-être là le plus bel héritage laissé par Patrick Fischer. En 2025, toutes les stars du hockey suisse sont fières de venir porter le maillot suisse. Était-ce autant le cas en 2015? Évidemment que non. Alors oui, il a aussi bénéficié de la génération dorée du hockey helvétique pour mener à bien son plan. Mais la trace que laissera Patrick Fischer dans l'attachement au drapeau est indélébile et va demeurer encore sous Jan Cadieux, un entraîneur qui partage les mêmes valeurs que lui.