Qu'il paraît loin le temps où l'on nous parlait de révolution. Instauration d'un plafond salarial, limitation des coûts, augmentation du nombre d'étrangers. Bref, aucun tabou ne semblait avoir résisté à la crise du coronavirus. Ce jeudi, les dirigeants ont finalement donné un message fort: ils ne sont pas prêts à changer quoi que ce soit. Pire, la décision prise par les douze CEO de National League va accroître la disparité dans la ligue.
Car avec une finale Zoug - Genève lors du dernier championnat, nous avons eu la preuve qu'un équilibre certes encore tout relatif pouvait aussi exister dans le championnat de Suisse. Après l'hégémonie du Big 4 (Berne, Zurich, Lugano et Davos), d'autres avaient aussi le droit de rêver de titre national. En permettant l'engagement de six étrangers dès la saison 2022-2023 (à condition qu'une équipe de Swiss League soit promue), la National League s'est mis un superbe auto-goal.
Plafond salarial impossible
Car, initialement, l'idée était de coupler cette augmentation avec l'instauration de mesures visant à réduire les coûts. Les joueurs importés auraient permis de détendre un marché saturé depuis plusieurs années. Et avec le nombre d'équipes désormais financièrement concurrentielles, il devenait urgent de réagir. Mais c'est tout le contraire qui vient de se produire. Dans leur communication, les clubs parlent de «fair-play financier» à compter de la saison 2020-2021 en ces termes:
«Les clubs ont décidé l’introduction, dans le cadre d’un Gentlemen Agreement, du Financial Fairplay pour la saison 2021/22, puis d’en poursuivre le développement. Ce dernier servira aussi à traiter de thèmes tels qu’un plafonnement des salaires et d’éventuelles sanctions.»
Qu'est-ce que cela veut dire? Pas grand-chose, en fait. Point de plancher ni de plafond à l'horizon. Point de pénalité pour les clubs les plus dépensiers. En gros, les clubs vont collecter des informations et réfléchir à l'instauration d'un sytème de régulation des salaires. Mais l'implémentation pure et dure d'un plafond salarial n'aura jamais lieu (sauf miracle). Trop compliqué par rapport à la Commission de la Concurrence (COMCO).
Le rôle de Bienne
Les équipes les plus riches (cherchez la liste plus haut sous Big 4 et remplacez Davos par Lausanne et Zoug) vont pouvoir délier les cordons de leur bourse pour taper fort sur le marché des étrangers tandis que les autres devront se contenter de miettes. Reste à savoir pourquoi Bienne s'est rallié à cette cause. Les Seelandais sont-ils finalement moins «middle class» qu'ils ne veulent bien le dire? Mais c'est un autre débat.
Au moment où la «révolution» (ce n'en finalement pas une) avait été ébauchée, le tableau était peut-être trop beau et peut-être que les gens qui y ont cru (l'auteur de ces lignes y compris) ont été trop naïfs. Depuis ces premières pierres posées, la conviction des clubs était faite: les mesures passeront en bloc... ou ne passeront pas. Aujourd'hui, force est de constater que le plan de base des initiants était bien différent.
Finalement, on en revient toujours à une maxime dans le championnat de Suisse. Si une règle n'avantage pas Zurich ou Berne, elle n'a aucune chance de passer. Le fair-play financier les aurait-ils avantagés? Poser la question, c'est finalement y répondre.