Patrick Rochat reçoit... au golf d'Aigle, après son 18 trous matinal! «Je ne comprenais pas ce que les gens pouvaient bien trouver à ce sport, je trouvais ça plat. Et puis, il y a deux ans, j'ai commencé et je suis devenu addict. Je viens quasiment tous les jours de la semaine de 8h à midi», sourit-il au club-house en cette belle matinée ensoleillée. A la retraite depuis deux ans, le très en forme speaker emblématique du Lausanne-Sport ne fait pas ses 65 ans. «Je voulais profiter de ma retraite, j'ai anticipé un peu», explique l'ancien garagiste, pas du genre à regarder vers l'arrière. Les dates, les fonctions, les honneurs, très peu pour lui. «Je suis sans cesse tourné vers l'avenir. J'ai encore tellement de choses à faire.»
«Le micro ne me faisait pas peur»
Son garage Nissan, au Mont-sur-Lausanne, il l'a tenu toute sa vie, lui qui n'avait aucune prédisposition à exercer le métier de mécano. «Mon père était boulanger, puis policier. Mais moi, depuis tout petit, j'étais attiré par la mécanique». En parallèle de l'école et de sa vie professionnelle future, le gamin s'inscrit au foot, au FC Le Mont, y joue en actifs, part un moment au FC Bottens, puis revient dans le club de son village. «Et là, alors que je suis président des seniors, on me demande de devenir président central. Je dis oui et je prends aussi le rôle de speaker en parallèle. Il fallait bien quelqu'un.»
Pas par gloire ou par recherche de prestige, juste pour rendre service et combler un trou, si l'on ose dire. «J'avais été président de la Jeunesse, j'ai fait partie du comité des Abbayes réunies. Le micro ne me faisait pas peur, on va le dire ainsi», rigole-t-il. Que Le Mont soit en 1re ou en 2e ligue, peu importe, il ne se rappelle d'ailleurs pas de la ligue dans laquelle le club se trouvait lorsqu'il en a repris la présidence. «Aucune importance, vraiment.»
Le LS vient le recruter au Mont
Ce dont il se rappelle très bien, par contre, c'est comment le Lausanne-Sport l'a recruté. Ou plutôt convaincu de venir. «On faisait les finales avec Le Mont, contre Chiasso. Gianluca Sorrentino, qui bossait au LS à l'époque, est venu vers moi ce jour-là et m'a proposé le poste de speaker. Le Lausanne-Sport! Comment dire non?» Il dit un grand oui, sans en faire une histoire d'argent. «Vraiment pas! Mon job, c'était le garage. Le foot, c'est ma passion. J'aime être bénévole, rendre service. Donner, c'est important dans la vie, s'engager pour la communauté aussi.»
Les week-ends sont alors très chargés, puisqu'il officie au Mont et au LS en même temps, jusqu'à la relégation volontaire du club alors présidé par Serge Duperret. «Là, je dis stop.» Pas longtemps, vu que Stade-Lausanne-Ouchy lui propose peu après de venir s'occuper des matches à la Pontaise. Et comme Patrick Rochat ne sait pas dire non... Ses week-ends n'ont pas rétréci!
Ce dimanche, son dernier match à la Tuilière
Mais là, tout de même, en ce mois de mai 2025, il a décidé de «dire stop» au Lausanne-Sport. Ce dimanche, face à Lugano (16h30) à la Tuilière, il sera au micro pour ce qui sera son dernier match. «Comme je l'ai dit, je veux profiter de ma retraite au maximum. J'habite Champéry maintenant, consacrer chaque week-end au foot, c'est devenu trop», glisse-t-il, sans aucune nostalgie. «Je ne suis pas triste du tout, vraiment. Je me dis que c'est l'occasion de faire autre chose. Je suis heureux de laisser ma place aux jeunes, tout simplement.»
Ainsi est Patrick Rochat, un vrai bon type, à la vaudoise, fier de son canton et de ses racines. «Quand j'étais jeune, j'ai eu l'occasion d'aller bosser en Suisse alémanique. Je suis allé voir... et je suis vite revenu. Chez moi, c'est le canton de Vaud. Le Valais à la limite. Mais pas plus loin.» Il tient aux traditions, à l'hymne vaudois avant les matches. A son accent aussi, qui a fait sa réputation et la fait encore. «Mais je ne force rien, je parle normalement. Je sais bien que ma façon de prononcer 'minimoum' peut faire sourire, mais c'est comme ça que je le dis vraiment!»
Quentin Rushenguziminega, pas facile
Alors, ce dimanche, il montera une dernière fois dans sa cabine à la Tuilière, sans vrai rituel ou superstition. «J'arrive deux heures et demie environ avant le coup d'envoi. Je prépare mon match, c'est tout, je ne fais rien de spécial.» Il regarde les noms des joueurs adverses et s'il y en a un plus compliqué que les autres, il descend sur la pelouse pour demander à un membre du staff comment le prononcer. «J'en ai eu des gratinés depuis toutes ces années, comme Quentin Rushenguziminega ou Billy Ketkeophomphone, mais j'aime bien!»
Le plus grand challenge? «Un Suisse-Azerbaïdjan chez les filles, c'était chaud!» Non pas Ana Maria Crnogorcevic, mais bien les Azéries. «Là, oui, j'ai transpiré! J'ai pris du temps avec un membre de l'équipe, je notais tout en phonétique, il rigolait. Mais il était content. C'est comme avec les arbitres, je vais leur demander si j'ai un doute. J'ai ce respect en moi, bien ancré.»
La Coupe d'Europe en 2010, le bon souvenir
Homme au contact très facile, extrêmement chaleureux, Patrick Rochat est petit-fils de paysan et fier de cultiver ces valeurs. «Chez moi, on se sert la main, on s'intéresse à l'autre. C'est pour ça que j'apprécie Ludovic Magnin. Il te dit toujours bonjour, il ne te traite pas comme un numéro.»
Souffre-t-il du manque de considération des joueurs? «Je ne suis pas devenu speaker pour être copain avec eux! Je n'attends rien en retour, mais c'est vrai qu'à part Olivier Custodio ou Thomas Castella, je n'ai de contact avec aucun joueur aujourd'hui. Quand j'arrive au stade, je monte dans ma cabine, ils vont sur le terrain. On ne se côtoie pas.» Pas comme en 2010, l'année de la dernière participation du LS à une Coupe d'Europe, un souvenir formidable pour lui. «Palerme, le CSKA Moscou... Et l'équipe était sympa.» Les Sébastien Meoli, Guillaume Katz, tous les autres. «Des vrais bons types.»
Voilà, ce dimanche à 18h30, ce sera fini, il éteindra son micro. Sera-t-il fêté? «Encore une fois, je n'attends rien. J'ai vu passer que la Commune du Mont était invitée et qu'il y avait ma tête sur une affiche... Il y aura peut-être une surprise ou l'autre, on verra bien! Mais en ce qui me concerne, il n'y a rien de prévu.» Servir et disparaître, voilà sa philosophie, avec quelques anecdotes sympas tout de même.
Une fois au volley, mais c'est tout
«C'est fou, les gens sont vraiment bienveillants avec moi. Je fais des selfies, vous vous rendez compte? Un jour, un supporter du LS m'a demandé d'annoncer les invités à son mariage comme s'il s'agissait d'un match! Je n'ai pas pu, parce que j'avais moi-même un match ce soir-là justement, mais je lui ai enregistré des bandes-son, c'était sympa.» Il a également officié une fois au volley, parce que Cheseaux lui avait demandé de l'aide pour une campagne européenne. «Et j'ai entendu que le club de hockey de Champéry aurait besoin d'un speaker...»
Il continue avec le SLO à la Pontaise
Tel est donc Patrick Rochat, l'homme qui est devenu speaker pour rendre service un beau jour et s'est retrouvé au micro des plus belles affiches de Super League, à faire entendre son accent vaudois à des milliers de personnes. Ce dimanche, les applaudissements du stade lui feront chaud au coeur une dernière fois, mais jamais plus qu'une bonne poignée de main et une franche discussion face à face. Et, qui sait, peut-être que le mythique «minimoume» retentira encore une fois ou deux dans les haut-parleurs de la Tuilière.
«J'arrête, c'est sûr, mais je serai toujours à disposition du club. Si vraiment une fois il y a un problème, ils peuvent m'appeler, je descendrai depuis Champéry. Mais s'ils n'ont pas besoin, je resterai sur ma montagne!» D'où il continuera tout de même à descendre pour officier lors des matches du SLO, à la Pontaise («Ils ont besoin de moi, c'est moins facile de trouver un successeur qu'au LS»), et surtout, surtout, pour jouer au golf tous les matins du lundi au vendredi et profiter de sa retraite pendant de longues années. Minimoume!