Yann Sommer, Gregor Kobel et... Stefan Frei! Ils sont bien trois gardiens suisses, en plus de Lucas Blondel et de Manuel Akanji, à disputer la Coupe du monde des clubs en ce moment aux Etats-Unis, le portier saint-gallois de 39 ans ayant une histoire singulière.
Né à Altstätten, il a émigré avec ses parents à l'âge de 15 ans en Californie, laissant derrière lui le football suisse, alors qu'il était international M15 justement, au côté de Tranquillo Barnetta et Reto Ziegler, par exemple. Il a tracé son chemin aux Etats-Unis, et comment, puisque c'est en très grande partie grâce à lui que Seattle peut disputer cette très prestigieuse et lucrative Coupe du monde des clubs. Les Sounders ont en effet remporté leur ticket en 2022 en remportant la Champions League de la CONCACAF, leur gardien suisse (naturalisé américain) étant nommé MVP de la compétition.
Ce dimanche soir, face à Botafogo, le cousin éloigné d'Alexander Frei a multiplié les parades en première période pour garder son équipe dans le match, même si les Brésiliens menaient 2-0 à la pause. Sans leur capitaine, qui a dépassé les 400 matches sous le maillot des Sounders et est devenu une légende locale, les Américains n'auraient jamais pu revenir et, au final, ne s'incliner que 2-1 dans leur premier match de cette «Club World Cup». Dommage, car les deux prochains matches s'annoncent plus que compliqués au Lumen Field avec les réceptions de l'Atletico Madrid, puis du Paris Saint-Germain!
Après la rencontre, Blick a retrouvé Stefan Frei dans les entrailles du gigantesque stade des Sounders pour une interview aux racines suisses, bien sûr.
Stefan, vous avez réussi une très belle deuxième mi-temps ce soir, vous auriez même pu égaliser en toute fin de match...
Oui, c'est vrai. On a joué contre une très bonne équipe aujourd'hui, on a bien abordé cette partie, mais on s'est tiré une balle dans le pied en leur offrant l'occasion de prendre deux buts d'avance avant la pause. C'était décevant d'être menés 2-0 à ce moment-là, mais notre réponse a été exceptionnelle en deuxième période. On ne voulait pas se précipiter, ni donner des signes de panique, ou encaisser un troisième but qui aurait été fatal. Nous les avons pressés de plus en plus, on a marqué ce but du 1-2, et on aurait mérité d'aller chercher l'égalisation. On va étudier tout ça à la vidéo, regarder ce qu'on a fait de bien et ce qu'on peut faire mieux. Je suis fier des gars.
Ce tournoi est critiqué en Europe, ce qui est difficile à comprendre vu d'ici...
C'est toujours bien de s'ouvrir aux autres. Ici, à Seattle, on joue en moyenne devant plus de 30'000 spectateurs. Peu de clubs en Suisse peuvent en dire autant, je pense... Les gens devraient s'intéresser un peu plus à ce qui se passe ailleurs. Il y a des styles différents et c'est très bien comme ça. L'Europe joue d'une certaine manière au football, avec beaucoup de technique. Si on voit Botafogo aujourd'hui, c'est très technique également. Et nous, à Seattle, on a des qualités athlétiques, du coeur, de la volonté, de la détermination. Cela donne des matches intéressants, où des équipes aux style différents s'affrontent.
Après toutes ces années passées aux Etats-Unis, tu te sens encore un peu Suisse?
Oui, bien sûr! J'y suis né, j'y ai passé les quinze premières années de ma vie, ça restera une partie de moi pour toujours. J'ai de très très bons souvenirs de la Suisse, très bien ancrés, j'ai encore des amis qui y vivent. Je suis fier d'avoir grandi en Suisse et je me sens privilégié aussi. J'ai eu une très belle enfance. Mais c'est vrai que j'ai 39 ans maintenant et que j'ai donc passé plus de la moitié de ma vie en Amérique du Nord, que ce soit aux Etats-Unis ou à Toronto, où j'ai débuté ma carrière professionnelle. Disons que je suis un peu un mix de tout ça!
Tu reviens souvent en Suisse?
Non, j'aimerais y retourner plus souvent, que ce soit à la maison ou pour visiter le reste du pays. Mais j'ai trouvé ici aussi une nature fantastique, dans l'Etat de Washington. C'est un endroit merveilleux pour vivre.
Es-tu revenu récemment en Suisse?
Non, cela fait un bon moment maintenant, je dirais trois ou quatre ans, que je ne suis pas revenu. Les saisons sont très longues et les distances pour aller disputer les matches sont énormes, bien plus qu'en Europe. Alors, quand tu as un mois pour te reposer à la fin de la saison, tu veux aller à la plage, pas reprendre l'avion pour voyager et traverser l'océan pour aller en Europe (rires)! Mais bien sûr que j'ai envie d'y retourner et profiter de la nourriture et de la culture suisses.
Tu as été international suisse M15, mais est-ce que tu suis encore les résultats de la Nati?
Oui, bien sûr, on vient de jouer contre les Etats-Unis! Là aussi, vu qu'on parlait de différences de styles, c'est intéressant de comparer. Je ne veux pas trop entrer dans des considérations politiques, mais je constate que la Suisse est un pays d'immigration et que si tu regardes les noms au dos des maillots, tu verras des joueurs qui viennent de différentes cultures et qui sont tous fiers d'être Suisses, qui donnent une identité unique à cette équipe. Ils se sentent très Suisses et ils apportent une identité, un esprit. Aujourd'hui, aux Etats-Unis, c'est un peu plus compliqué de ce point de vue.
Que veux-tu dire par là?
Je veux dire: quelle est l'identité de ton équipe? Qu'est-ce que ça veut dire d'être américain, sur le terrain? Je vois une grande cohésion dans l'équipe de Suisse, bien que ses joueurs proviennent d'horizons différents. Et c'est beau à voir pour une nation, cette union qui te rend plus fort. C'est très bien. Je pense que c'est quelque chose dont les Etats-Unis peuvent s'inspirer d'un petit pays comme la Suisse.
Tu as parlé de nourriture suisse. Elle te manque?
Déjà, il faut savoir que j'adore cuisiner! Je fais même mon pain, j'ai des petits trucs que ma maman m'a appris quand j'étais un petit garçon en Suisse et qui reviennent. Mais tu ne vas pas trouver de nourriture suisse ici! Par contre, il y a beaucoup de bonnes choses, surtout sur la côte Pacifique où nous sommes ici, si tu aimes la nourriture de la mer, tu vas te régaler. Bien plus qu'en Suisse! Alors, il faut sortir un peu de sa zone de confort, essayer les restaurants asiatiques aussi. Il y a beaucoup de bonnes choses partout!