Resté silencieux médiatiquement depuis la relégation d’Yverdon Sport en Challenge League, Jamie Welch a choisi cette trêve internationale pour communiquer sur la place publique. Pour Blick, le président et propriétaire australien d’YS, établi à Lugano, affirme son engagement fort pour le club nord-vaudois et met également une pression, assumée et transparente, à son entraîneur Adrian Ursea et à ses joueurs alors qu’il reste quatre matches de Challenge League (Yverdon est troisième) et un, très attendu, de Coupe de Suisse face au Lausanne-Sport. A Jamie Welch la parole.
Son engagement à Yverdon
Arrivé à l’été 2023 à Yverdon Sport dans la foulée de la promotion en Super League, Jamie Welch a connu sa première déception à l’été 2025 avec une relégation douloureuse en Challenge League, un an après un premier exercice très réjouissant. L’Australien installé au Tessin allait-il se désengager d’Yverdon Sport, ne serait-ce que progressivement, comme l’ont craint les supporters et l’entourage d’YS? La réponse est arrivée très vite cet été: non, il n’allait pas quitter le Nord vaudois. Il l’a réaffirmé avec force cette semaine.
Ce qu’en dit Jamie Welch
Je ne suis pas quelqu’un qui abandonne! J’ai une responsabilité envers ce club, cette communauté, tous les gens qui s’investissent pour Yverdon Sport. Lorsque nous avons été relégués, j’ai vu des gens pleurer, être touchés émotionnellement. Alors non, je n’ai jamais pensé à me désengager, bien au contraire. Cette descente a été l’un des pires moments de ma vie personnelle et professionnelle. Qu’elle ait été méritée ou pas n’importe pas. C’est la réalité qui compte. Et la réalité, c’est que nous avons été relégués. Il fallu comprendre pourquoi et aller chercher en profondeur ce qui n’avait pas fonctionné. Le regard que nous avons posé sur notre propre fonctionnement a été dur, sans concession. Il le fallait.
Les changements de cet été
Le directeur technique Filippo Giovagnoli et le président du football Jeffrey Saunders ont pris la porte dans la foulée de la relégation. Martin Andermatt, fort de sa très riche expérience dans le football suisse, a été engagé comme directeur technique, avec une mission prioritaire, mais pas unique: faire fonctionner l’académie.
Ce qu’en dit Jamie Welch
Est-ce que ça a été facile de me séparer de Filippo et de Jeff, deux amis? Non, ça n’a pas été facile. Mais il le fallait. Le football est fait de résultats, et ils étaient insuffisants. Comme je vous l’ai dit, nous avons regardé en profondeur ce qui n’avait pas été bien fait. Nous avons analysé notre échec et nous en sommes arrivés à la conclusion que de nombreuses choses n’avaient pas fonctionné, dont l’académie. Il fallait la repenser, amener une structure, surtout avec les équipes de M16 et M18 qui arrivaient chez nous, ce dont nous sommes ravis. L’engagement de Martin Andermatt est une réponse claire. Et du point de vue sportif pour la première équipe, il fallait changer beaucoup de choses pour pouvoir remonter immédiatement en Super League.
Du trading aux joueurs suisses
Les deux premières années «made in US» en Super League, Yverdon Sport s’était taillé une réputation de trading avec de très belles réussites, Kevin Carlos en tête, mais aussi Moussa Baradji, et Marley Aké par exemple. Mais, au final, YS s’est tout de même retrouvé dernier de Super League. Cet été, le projet a changé du tout au tout avec un recrutement 100% suisse ou quasiment.
Ce qu’en dit Jamie Welch
La première chose, nous avons été contraints d’adopter un modèle de trading, dans la mesure où nous n’avons actuellement pas accès à la formation nécessaire. Deuxièmement, c ‘est le règlement de la Challenge League, qui nous oblige à avoir une majorité de joueurs HTP (Home-Trained Player, joueur formé localement). Nous en avions cinq. Il fallait inverser la tendance et donc chambouler complètement l’effectif. Des joueurs ont voulu partir et continuer leur carrière à plus haut niveau, je pense à Moussa Baradji aux Blackburn Rovers ou Marley Aké à Zulte-Waregem. Donc oui, nous avons changé énormément de joueurs, nous y étions obligés. L’été a été chaud! Aujourd’hui, nous avons un bon équilibre, avec des joueurs étrangers très convaincants, comme Jason Gnakpa, l’une des satisfactions de ce début de saison, et beaucoup de joueurs suisses. Nous avons de la profondeur et un bel effectif. Mais oui, nous avons tout changé.
La philosophie de jeu
En engageant Adrian Ursea, Yverdon Sport a renoué avec une tradition de beau jeu née à la fin des années 90 avec l’arrivée de Lucien Favre au Stade municipal. Radu Nunweiler en a été un magnifique héritier et, au fil des années, Yverdon s’est bâti une réputation d’endroit où le ballon était bien traité. Le technicien helvético-roumain s’inscrit dans cette filiation prestigieuse.
Ce qu’en dit Jamie Welch
Quand nous avons choisi Adrian cet été au milieu de très nombreuses candidatures, c’est précisément grâce à cela. J’ai immédiatement senti chez lui une volonté très forte de rejoindre Yverdon et d’y implanter sa philosophie, cette culture de la possession qui est une réalité dans les grands clubs européens. Le Bayern, le PSG, Manchester City, Barcelone… Quand le ballon est dans vos pieds, il n’est pas dans votre but. Adrian Ursea a cette philosophie. Il a les joueurs dont il a besoin pour jouer ainsi. Je vais vous donner un exemple: Paul Bernardoni. C’est un gardien d’excellent niveau et c’était sans doute notre meilleur joueur la saison dernière, avec Moussa Baradji peut-être. J’ai un immense respect pour Paul, qui est un «shoot-blocker» exceptionnel. Mais au pied, il ne correspond pas à la philosophie d’Adrian Ursea, contrairement à Kevin Martin et Simon Enzler, qui jouent comme des défenseurs centraux. Alors oui, nous jouons bien, nous avons le ballon et il y a eu des passages spectaculaires, mais aussi un manque de tranchant offensif qui me déçoit.
La situation actuelle
Yverdon Sport est aujourd’hui troisième de Challenge League, à six points de Vaduz et d’Aarau. YS est toujours qualifié en Coupe de Suisse après avoir éliminé Servette et affrontera le Lausanne-Sport en 8es le mercredi 3 décembre.
Ce qu’en dit Jamie Welch
Je vais être clair: les dernières semaines m’ont déçu. Nous n’avons pris que cinq points sur douze possibles et ce n’est pas assez. Je place chacun devant ses responsabilités. Et je dis bien chacun. Si la barre n’est pas redressée, je prendrai toutes les décisions nécessaires dans les prochaines semaines pour qu’Yverdon puisse jouer en Super League à l’été 2026. Ce que je n’aime pas, c’est que nous répétons les mêmes erreurs. Contre Vaduz, un homme seul au deuxième poteau: but. Contre Xamax, Koro Koné seul au deuxième poteau, but. La Challenge League est un championnat compliqué, tout le monde vient défendre contre nous. Les équipes jouent en 5-4-1 et nous contrent, mais nous peinons dernièrement à trouver des solutions. C’est paradoxal: contre Servette, une équipe joueuse, nous gagnons et produisons un super spectacle. Ce sera le cas contre Lausanne aussi le 3 décembre, j’en suis persuadé. Mais on doit trouver des solutions contre les blocs bas, parce que les adversaires ne vont pas changer leur façon de jouer pour nous faire plaisir. On doit s’améliorer, tous.
Les objectifs
Yverdon veut-il remonter immédiatement? En début de saison, Adrian Ursea a réclamé du temps, mais aujourd’hui, le message est clair: le technicien helvético-roumain a une obligation de résultats.
Ce qu’en dit Jamie Welch
Je vais être très clair là aussi: notre ambition est de fêter trois promotions à la fin de la saison. Celle de notre première équipe masculine. Celle de notre première équipe féminine. Et celle de notre deuxième équipe masculine. Aujourd’hui, je veux que nous ayons une mentalité de gagnants, de vouloir tout donner pour ce blason qui a été porté par de glorieux joueurs à travers l’histoire. Je l’ai dit aux joueurs et je vous le dis: il faut toujours avoir l’envie de tout donner, cette volonté de se dépasser. Alors, oui, aujourd’hui je mets la pression à Adrian Ursea et je la mets aux joueurs. Aarau et Vaduz font un très bon championnat, ils ont la constance qui nous manque. Nous devons les rattraper et nous donner la chance de monter, même si c’est au travers du barrage. Nous devons avoir cette ambition pour notre communauté, nos fans, et nos partenaires, qui sont exceptionnels et envers lesquels nous sommes reconnaissants. Tant que nous n’aurons pas ces objectifs, je ne serai pas reposé. Et personne autour de moi ne le sera.
Le mercato hivernal
C’est entendu, Jamie Welch met la pression à son groupe et à son entraîneur. Adrian Ursea est donc un entraîneur qui a une obligation de résultats sans équivoque de la part de son propriétaire et président, et pas uniquement dans le secret du vestiaire, mais également sur la place publique désormais. Mais l’entraîneur d’YS pourra-t-il compter sur un effort de celui-ci au mercato hivernal?
Ce qu’en dit Jamie Welch
Oui. Je me tiens prêt à renforcer l’équipe. Je le redis avec force: je veux faire ce qui est nécessaire pour aller chercher la promotion. Et si cela passe par des investissements cet hiver, alors nous le ferons. Y compris pour notre deuxième équipe, d’ailleurs. Pour ce qui est de la première équipe, je vais être clair: notre principal chantier est l’attaque et le poste de numéro 9 en particulier.
Un directeur sportif?
Yverdon a un directeur technique, Martin Andermatt, mais pas de directeur sportif. Comment ont été effectués les transferts cet été? Qui les fera cet hiver? L’engagement d’un directeur sportif est-il d’actualité?
Ce qu’en dit Jamie Welch
Aujourd’hui, nous n’avons effectivement pas de directeur sportif. Pour structurer nos décisions, nous nous appuyons sur un groupe de consultants expérimentés qui agit comme un comité sportif élargi. Parmi eux se trouve Lorenzo Falbo, agent établi en Suisse, reconnu pour son réseau, sa grande réputation et sa connaissance du marché. Nous collaborons également avec d’autres profils spécialisés, qui interviennent ponctuellement sur des sujets précis. Pour l’avenir, nous restons ouverts à différentes options. La mise en place d’une fonction plus formelle pourra être envisagée lorsque nous jugerons que c’est le bon moment pour le club. Pour l’instant, la structure actuelle répond bien à nos besoins
L’équipe féminine
Actuellement solide leader de LNB, l’équipe féminine d’Yverdon Sport sort d’un match héroïque face à Saint-Gall, perdu aux tirs au but.
Ce qu’en dit Jamie Welch
Elles marquent des buts à foison, elles créent du spectacle, elles font plaisir! Nous avons investi pour cette équipe, que ce soit pour faire venir des joueuses de haut niveau ou pour créer ce poste de manager-entraîneur à 100 %. Nous ne parlons pas, nous agissons. La saison dernière, elles ont échoué d’un rien en barrages, mais elles ont acquis l’expérience nécessaire pour y arriver dans quelques mois. Elles ont désormais la certitude qu’elles sont assez fortes et elles ont la volonté pour y arriver. Nous sommes aussi très heureux du soutien grandissant du public: match après match, l’ambiance au Stade Municipal se renforce. Cette équipe trouve son public, et c’est une véritable satisfaction pour tout le club. Nous allons monter en Super League, j’en suis convaincu. Et elles aussi.
La copropriété
Voilà quelques mois, alors qu’Yverdon Sport était encore en Super League, Jamie Welch avait laissé entendre dans une interview pour Bloomberg qu’il envisageait de créer un conglomérat de clubs en Europe. Cette réflexion est-elle toujours d’actualité?
Ce qu’en dit Jamie Welch
Aujourd’hui, le cadre imposé par l’ASF et l’intégration de notre filière masculine au sein de Team Vaud nous oblige à trouver des solutions hors de Suisse pour garantir une véritable pyramide de formation à nos jeunes joueurs. Sans une M21 labellisée en interne, il devient indispensable d’explorer des partenariats ou des passerelles sportives à l’étranger pour assurer un niveau de compétition cohérent avec leur développement. Donc, afin de stabiliser Yverdon Sport en Super League, j’aimerais créer cette association de clubs, en regardant du côté de l’Italie, de l’Espagne, du Portugal, voire de la France, par exemple avec des clubs de deuxième ou troisième division. Ce besoin de formation structurée ne concerne toutefois que le secteur masculin via cette stratégie de multi clubs. Du côté féminin, nous bénéficions d’une liberté totale pour structurer et professionnaliser notre filière, un contraste surprenant qui souligne l’importance de construire un modèle pérenne et pleinement maîtrisé pour nos joueuses.
Équipe | J. | DB. | PT. | ||
|---|---|---|---|---|---|
1 | FC Vaduz | 14 | 18 | 33 | |
2 | FC Aarau | 14 | 11 | 33 | |
3 | Yverdon Sport FC | 14 | 13 | 27 | |
4 | Neuchatel Xamax FCS | 13 | 5 | 21 | |
5 | FC Stade-Lausanne-Ouchy | 13 | 3 | 19 | |
6 | FC Stade Nyonnais | 14 | -2 | 17 | |
7 | FC Rapperswil-Jona | 14 | -6 | 13 | |
8 | Etoile Carouge FC | 14 | -7 | 12 | |
9 | FC Wil | 14 | -15 | 11 | |
10 | AC Bellinzone | 14 | -20 | 7 |