Blaise Nkufo fait partie des rares attaquants suisses qui ont su marquer de leur empreinte un club étranger. À Twente, le Lausannois est en effet devenu une véritable légende. De celles qui vont jusqu'à voir une statue à leur effigie être posée devant le stade.
Le Suisse est pour les «Tukkers» ce que Thierry Henry est pour les «Gunners» d'Arsenal: une icône. Pour Blick, l'attaquant aux 130 buts en 268 matches et un titre de champion d'Hollande avec Twente a accepté de revenir sur sa longue carrière.
Racontez-nous vos premiers contacts avec le ballon...
Je suis arrivé au foot grâce à mes copains. J'ai grandi à la Bourdonette à Lausanne, dans un quartier multiculturel. On jouait du matin au soir et un beau jour, on a décidé d'aller faire un essai au Stade Lausanne. Je l'ai passé avec succès et je suis passé à un football plus organisé.
Toujours au poste d'attaquant?
À vrai dire, j'ai une formation de milieu de terrain. J'ai joué la plupart de ma période en jeune comme numéro dix. Après mon départ du Lausanne-Sport pour Yverdon, c'est Claude Ryf qui m'a mis à un poste plus avancé, car il y avait un besoin. J'ai rendu de bons services et j'y suis resté.
Est-ce que dans les années 90 on rêvait déjà de devenir footballeur professionnel?
Non, ma génération avait avant tout une passion pour le foot. Aujourd'hui aussi, mais il y a également tout le bling-bling et ce qui va avec qui attire les jeunes. Nous, nous étions sur le plaisir du jeu. J'ai commencé à entrevoir le fait de pouvoir devenir professionnel vers 16-17 ans lorsque j'ai débuté au Stade Lausanne.
Comment étaient vos entraînements lorsque vous étiez en junior?
Nous avions un coach qui était passionné et qui a su nous transmettre sa passion pour que nous venions à l'entraînement qu'il neige, pleuve, ... etc. J'étais toujours à l'entraînement et quand mon papa m'interdisait d'y aller à cause d'une mauvaise note, je pleurais dans ma chambre (Rires). Voilà ma jeunesse footballistique.
Un monde complètement différent de l'actuel donc. J'imagine que c'était compliqué de quitter le LS pour réaliser le grand saut vers Grasshopper pour une somme de transfert record en Suisse à l'époque (2.25 millions d'Euros)?
C'est une période que j'ai subie. Plusieurs événements n'ont pas joué en ma faveur. De grands joueurs, comme Kubilay Türkyılmaz par exemple, devaient partir, mais ils sont restés. De plus, la qualification pour la Ligue des champions n'a pas abouti, il y a eu des troubles dans la direction, ... Le fait également de quitter la Romandie pour aller dans un environnement très différent comme celui de Zurich a rendu les choses plus compliquées. C'est une opportunité que je n'ai pas saisie.
Et après un passage à Lugano et à Lucerne, vous découvrez l'Allemagne et sa deuxième division. Pourquoi ce choix?
J'ai eu le sentiment d'avoir fait un peu le tour ici et j'ai eu l'opportunité de partir en deuxième division allemande. Cette décision a été prise avec l'objectif de découvrir la Bundesliga au bout de deux saisons maximum. Et c'est ce que j'ai pu faire avec notamment les débuts de Jürgen Klopp.
À ce propos, comment était-il aux prémices de sa carrière d'entraîneur?
C'est le même qu'on voit aujourd'hui. Il avait déjà ses idées de jeu, au niveau de l'intensité et du contre pressing. On s'est mis à travailler davantage le physique et à être mieux organisés sur le terrain. C'est un personnage très riche qui veut gagner et ce qu'on dit aujourd'hui de lui, j'ai pu le voir durant mes 18 mois sous ses ordres à Mayence.
Quelles ont été les différences avec ce que vous avez pu connaître en Suisse?
Au niveau de l'exigence, c'était bien plus élevé en Allemagne. La culture du travail y est bien plus importante. Je me souviens qu'avec Ralf Rangnick, lors de la préparation estivale à Hannovre, nous nous levions à 6h du matin avec ce programme: jogging, déjeuner, entraînement à 10h, repos, dîner et nouvel entraînement l'après-midi. Les demandes étaient bien plus accrues.
Voit-on également cette différence entre la Suisse alémanique et la Suisse romande?
De mon temps, il y avait une différence entre Lausanne et GC et je pense qu'elle existe encore. On voit aujourd'hui qu'au niveau du développement des jeunes, la partie germanophone du pays montre davantage d'exigences en termes de travail.
Ces étapes à GC et Lucerne ont donc été pour vous une belle préparation avant de franchir la frontière...
Oui, je dirais que cela m'a préparé. Mais au-delà du fait de quitter la Suisse pour l'Allemagne, il y a déjà un changement complet d'environnement en passant de Lausanne à Zurich. Les mentalités y sont bien différentes.
Sur quels points?
Ils sont plus sûrs et plus prétentieux que nous, sans être péjoratif. De notre côté, nous sommes sont plus humbles.
Une chose étonne dans votre parcours, votre crochet par le Qatar en 1995. Pourquoi avoir fait ce choix à 20 ans seulement?
Mon contrat n'avait pas été renouvelé par le Lausanne-Sport et j'ai eu cette possibilité. Ce sont des parcours de vie qu'on ne choisit pas forcément, mais on saisit les opportunités et c'est bien si on peut les faire fructifier. D'ailleurs, c'est cette étape qui m'a permis de me relancer en Suisse.
Après l'Allemagne, votre histoire avec Twente débute. Pourquoi quitter la Bundesliga pour l'Eredivisie?
J'étais bouché par la concurrence et par le manque d'opportunité. Le président de l'époque à Twente a fait le forcing pour m'accueillir et l'entraîneur en place me voulait vraiment. Tout était donc mis en œuvre pour que cela se fasse et se passe bien. Et c'est là-bas que j'ai beaucoup appris et compris le football au niveau tactique et technique. J'y ai pris beaucoup de plaisir.
Quel a été votre meilleur coéquipier?
Bryan Ruiz, à Twente.
L'équipe la plus forte que vous ayez affronté?
L'Espagne. Même si j'ai joué contre le grand Real Madrid de Zidane, Roberto Carlos et Ronaldo à Yverdon.
L'adversaire qui vous a le plus impressionné?
Micah Richards. Un défenseur très imposant et rapide. Il m'a marqué.
Votre plus beau but?
Celui que j'ai inscrit contre Feyenoord avec Twente en 2003. J'ai pu éliminer plusieurs joueurs et marquer dans la lucarne opposée (dès 4:29).
Le plus grand match de votre carrière?
J'ai aimé ma performance contre l'Espagne. Et en club, je retiens le 1-1 contre l'Ajax après avoir été mené jusqu'à deux minutes de la fin. J'ai marqué et nous avons pu obtenir un point important dans la recherche du titre.
Quel a été votre meilleur coéquipier?
Bryan Ruiz, à Twente.
L'équipe la plus forte que vous ayez affronté?
L'Espagne. Même si j'ai joué contre le grand Real Madrid de Zidane, Roberto Carlos et Ronaldo à Yverdon.
L'adversaire qui vous a le plus impressionné?
Micah Richards. Un défenseur très imposant et rapide. Il m'a marqué.
Votre plus beau but?
Celui que j'ai inscrit contre Feyenoord avec Twente en 2003. J'ai pu éliminer plusieurs joueurs et marquer dans la lucarne opposée (dès 4:29).
Le plus grand match de votre carrière?
J'ai aimé ma performance contre l'Espagne. Et en club, je retiens le 1-1 contre l'Ajax après avoir été mené jusqu'à deux minutes de la fin. J'ai marqué et nous avons pu obtenir un point important dans la recherche du titre.
Vous y êtes restés sept ans, êtes-vous tombés amoureux de ce club?
Oui, c'est un club dont j'ai porté le brassard de capitaine, avec lequel j'ai pu disputer la coupe d'Europe et qui est donc gravé dans mon cœur. D'ailleurs, on me l'a bien rendu avec la construction d'une statue. Je garde de très bons souvenirs et cela restera un club particulier pour moi.
À propos de la statue, quelle a été votre première réaction lorsque vous l'avez appris?
Je suis quelqu'un d'humble et je ne l'ai pas demandée. Ce fut une initiative des fans et je les en remercie. Il faut aussi dire que j'ai porté le club sur mes épaules grâce à mes buts si je puis dire et lorsque l'on est engagé, on reçoit toujours quelque chose en retour.
Vous êtes le quatrième meilleur buteur étranger de l'histoire de l'Eredivisie avec 114 buts, c'est un sacré exploit...
Oui, et je pensais que cela aurait eu une autre résonance en Suisse, c'étaient mes plus belles années. Cependant, je n'ai pas su montrer cela au niveau international. Cela aurait pu m'amener vers d'autres clubs, mais je suis fier et reconnaissant, car cela démontre le travail que j'ai fait. On dit souvent que nul n'est prophète chez soi, c'est peut-être mon cas tout simplement (Rires).
Pourquoi quitter le club après avoir remporté le titre de champion et acquis une qualification en Ligue des champions? Vouliez-vous partir en étant au sommet avec Twente?
Ce sont des choix de vie. Je voulais vivre autre chose, j'étais dans une nouvelle démarche psychologique et nous avons pris cette décision de partir aux États-Unis. Finalement, cela a plus été une expérience de vie, car la MLS ne m'a pas plu.
Qu'est-ce qui n'allait pas à cette époque?
En Hollande, on jouait un football total et cette philosophie y est très présente au sein du championnat. En MLS, à cette période, je n'ai pas vu des entraînements qui me parlaient. Le coaching était basé sur le physique avant tout et c'était très loin du football qui me plaît.
Vous parle-t-on encore de la fameuse victoire contre l'Espagne en 2010?
Bien sûr, dans les reportages, on dit que je suis à l'origine du but, même si c'est mon ami Gelson (ndlr: Fernandes) qui l'a marqué. Cela fait plaisir, mais je retiens surtout le fait qu'Ottmar Hitzfeld me rappelle et fasse un pari sur moi. Je lui rends d'ailleurs bien à travers mes performances qui ont aidé à cette qualification pour la Coupe du Monde. Je suis fier d'avoir pu démontrer que l'Équipe de Suisse pouvait compter sur moi malgré ce qui a pu se dire.
Vous reste-t-il un goût d'inachevé après ce premier succès?
Je regrette de ne pas avoir pu concrétiser cette victoire extraordinaire face aux futurs vainqueurs de la compétition. L'équipe qui prend les trois points peut espérer passer au prochain tour si elle confirme. Nous nous sommes peut-être reposés sur nos lauriers.
Que se dit-on sur le terrain en tant qu'attaquant face à une formation espagnole qui a autant la possession de la balle?
Si on n'est pas apte à conserver le ballon, vous ne faites que courir, défendre et c'est impressionnant de jouer contre une formation qui a une telle maîtrise, une intelligence de jeu supérieure à la moyenne et une technique irréprochable. De l'extérieur, on voit que c'est fort et de l'intérieur, c'est encore plus flagrant. Mais nous avions un plan et le plus important face à ces équipes est d'avoir un bel état d'esprit. Nous n'avons pas été avares d'effort individuellement et collectivement et cela nous a sauvés.
Avez-vous des regrets concernant votre carrière?
Non, nullement. C'est le foot qui veut ça. Chacun a sa carrière et j'ai aussi pu rencontrer ma femme et fonder ma famille.
Transferts
Stade Lausanne: Formation - 1993.
Lausanne-Sport: 1993 - 1994. 2/0
FC Echallens: 1994 - 1995. 16/9
Al Arabi Doha: 1995 - 1996. 12/6
Yverdon Sport: 1996 - 1997 35/12
Lausanne-Sport: 1997 - 1998. 34/18
Grasshopper: 1998 - 2000. 5/2
(prêt) FC Lugano: Janvier 1999 - décembre 2000. 21/14
FC Lucerne: 2000 - janvier 2001. 19/7
FC Mayence: 2001 - 2002. 45/21
Hannovre: 2002 - 2003. 11/2
FC Twente: 2003 - 2010. 281/139
Seattle: 2010 - mars 2011. 11/5
Entraîneur du FC Lausanne City: 2023 -
Palmarès
Champion du Qatar 1995/1996
Coupe de Suisse 1997/1998
Champion d'Hollande 2010
US Open Cup Winner 2009/2010
Transferts
Stade Lausanne: Formation - 1993.
Lausanne-Sport: 1993 - 1994. 2/0
FC Echallens: 1994 - 1995. 16/9
Al Arabi Doha: 1995 - 1996. 12/6
Yverdon Sport: 1996 - 1997 35/12
Lausanne-Sport: 1997 - 1998. 34/18
Grasshopper: 1998 - 2000. 5/2
(prêt) FC Lugano: Janvier 1999 - décembre 2000. 21/14
FC Lucerne: 2000 - janvier 2001. 19/7
FC Mayence: 2001 - 2002. 45/21
Hannovre: 2002 - 2003. 11/2
FC Twente: 2003 - 2010. 281/139
Seattle: 2010 - mars 2011. 11/5
Entraîneur du FC Lausanne City: 2023 -
Palmarès
Champion du Qatar 1995/1996
Coupe de Suisse 1997/1998
Champion d'Hollande 2010
US Open Cup Winner 2009/2010
Pour finir, que vous a apporté le foot?
Beaucoup de choses: Des souvenirs, des contacts, ... Avec Rangnick, j'ai appris la discipline, avec Klopp l'émotion du football et en Hollande le beau jeu. Ces expériences m'ont permis d'assembler passablement de connaissances que je peux utiliser aujourd'hui. Je suis heureux d'avoir eu la possibilité de faire de ma passion mon travail.