Le Conseil de l'Europe reconnaît des progrès de la Suisse suite à sa condamnation pour inaction climatique par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH). Il examinera à nouveau le dossier en septembre. Un rendez-vous qui sonne comme un rappel à l'ordre, selon les Aînées pour le Climat.
La Surveillance de l'exécution des arrêts de la Cour européenne note dans sa décision publiée vendredi que certaines questions ont été résolues pour atténuer les conséquences du changement climatique. Et de citer l'entrée en vigueur le 1er janvier de la loi sur le CO2 révisée, fixant des objectifs et des mesures climatiques jusqu'en 2030, ainsi que la loi relative à un approvisionnement en électricité sûr.
La Suisse doit plus d'informations
Les délégués notent également «avec intérêt» l'évaluation d'un premier budget carbone et les nombreuses mesures prises ou en cours de préparation aux niveaux fédéral et cantonal pour atteindre les objectifs d'émissions de gaz à effet de serre. Ils prennent acte aussi de l'élaboration d'une stratégie fédérale d'adaptation au changement climatique.
La Suisse doit cependant fournir de plus amples informations sur les progrès réalisés et la méthodologie utilisée face aux effets les plus graves ou imminents du changement climatique en Suisse, poursuit le comité des ministres du Conseil de l'Europe. Le 9 avril 2024, la juridiction de Strasbourg a condamné la Suisse pour inaction climatique, donnant raison à l'association Aînées pour le climat.
«Un désaveu»
Pour les avocats des Aînées pour le climat, cette décision est un grand soulagement. Le comité des ministres du Conseil de l'Europe rappelle la Suisse à ses devoirs, a indiqué à Keystone-ATS Raphaël Mahaim. La Suisse voulait clore la procédure de surveillance. Le Conseil de l'Europe lui rétorque, en termes certes diplomatiques, qu'il n'en est pas question, poursuit l'avocat. «C'est un désaveu cinglant pour le Conseil fédéral qui affirmait avoir fait tout ce qu'il fallait.»
Raphaël Mahaim rappelle que la seule chose qui a changé depuis l'arrêt de la CEDH concerne l'adaptation de la loi sur le CO2, qui inclut désormais une trajectoire de réduction des gaz à effet de serre pour la période 2024-2030, qui faisait défaut. Mais ce processus était déjà en cours, indépendamment de l'arrêt de la Cour.
Anne Mahrer, co-présidente des Aînées pour le Climat, est aussi «très, très satisfaite» de la décision du Conseil de l'Europe qui somme la Suisse de rectifier le tir en matière de lutte contre le réchauffement climatique.
Budget carbone
La Suisse doit démontrer que sa stratégie climatique est effectivement compatible avec un budget carbone, à savoir la quantité de gaz à effet de serre qu'elle peut encore consommer pour atteindre l'objectif d'un réchauffement limité à 1,5 degré. Ce budget carbone doit tenir compte de ce qu'elle a déjà émis.
Elle a jusqu'à présent été incapable de fournir cette preuve. «Elle continue au contraire d'avoir une consommation hors norme par rapport à ce qui lui reste», déplore Anne Mahrer. Si elle continue sur cette voie, elle aura épuisé dans sept ans le budget dont elle dispose encore, selon la variante de calcul la plus optimiste.
La Suisse optimiste
L'Office fédéral de la justice (OFJ) a lui salué les conclusions du Conseil de l'Europe. La Cour de Strasbourg indique qu'aucune mesure supplémentaire n'est nécessaire dans le cadre des mesures individuelles. La décision reconnaît également que la Suisse a comblé les lacunes législatives identifiées par la CEDH. L'exigence du comité des ministres du Conseil de l'Europe de livrer de plus amples explications sur certains points et des exemples concrets correspond à la pratique habituelle dans de telle procédure, ajoute l'OFJ.
Les autorités compétentes vont maintenant analyser en détail la décision du comité des ministres. «Il s'agit de démontrer que la Suisse remplit les exigences de l'arrêt en matière de politique climatique, comme le Conseil fédéral l'a déjà établi fin août 2024», conclut l'OFJ. Les délégués se pencheront à nouveau sur ce dossier en septembre.
Selon la CEDH, le changement climatique est l'un des problèmes les plus urgents de l'époque. L'action insuffisante de l’Etat a aggravé les menaces qui en découlent pour la jouissance des droits humains.