Décès, tortures, disparitions
Des enquêteurs dénoncent de nouveaux crimes contre l'humanité en Syrie

Le conflit syrien se dirige vers une possible relance massive, selon la Commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU. Elle a dénoncé mercredi à Genève de nouveaux crimes contre l'humanité ces derniers mois et des crimes de guerre.
Publié: 14.09.2022 à 13:43 heures
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La Commission d'enquête internationale indépendante sur la Syrie redoute de nouveaux affrontements dans le nord du pays (archives).
Photo: Ahmed Mardnli

«La Syrie ne peut se permettre un retour à des affrontements de grande dimension, mais il se peut que ce soit là où elle se dirige», déplore le président de la Commission, Paulo Sergio Pinheiro.

Les trois enquêteurs redoutent une nouvelle offensive terrestre turque dans le Nord. Plusieurs pays continuent de soutenir les différentes parties au conflit, selon l’une d’entre eux, Lynn Welchman. Et la Russie bombarde toujours certains territoires.

Vague de crimes depuis plus de 10 ans

Dans son nouveau rapport, la Commission, qui ne s’exprime pas au nom de l’ONU, relève que les vagues de crimes contre l’humanité observées depuis plus de dix ans ont à nouveau eu lieu entre janvier et juin. Torture, mauvaises attitudes contre des prisonniers aboutissant à leur décès, détentions arbitraires et disparitions forcées, la liste est à nouveau longue.

L’armée syrienne est notamment en cause pour avoir mené des raids contre plusieurs individus, battus pendant des heures et retenus sans contact avec leurs proches pendant des mois. Ces prisonniers ont été privés de nourriture, d’hygiène et de soins. Leur libération n’a été obtenue qu’après paiement de pots-de-vin.

Décès, tortures et disparitions

Neuf personnes ont également été torturées pour avoir déserté ou fait défection. Des crimes de guerre liés aux détentions ont aussi été identifiés dans des prisons de groupes armés.

Autre indication, certains ont appris ces derniers mois le décès d’un proche en détention depuis plusieurs années. Des dizaines de personnes qui étaient portées disparues depuis 2018, depuis qu’elles avaient fui la Ghouta orientale grâce à des couloirs humanitaires pilotés par la Russie, sont désormais déclarées décédées. Probablement exécutées, selon la Commission.

Plusieurs crimes de guerre ont également été perpétrés ces derniers mois, notamment en janvier et février. Près d’une centaine de civils ont été tués ou blessés dans des bombardements ou dans l’utilisation d’engins explosifs improvisés sur des territoires largement peuplés dans le Nord d’Alep.

Dans un incident début février, la Commission ne peut attribuer la responsabilité de tirs qui ont fait huit victimes. Ceux-ci ont été lancés soit depuis un village contrôlé par le gouvernement, soit par les forces kurdes.

L’armée syrienne serait en cause

De même, la Commission a «de bonnes raisons de penser» que l’Armée nationale syrienne (ANS), proche de la Turquie, a perpétré des actes qui peuvent équivaloir à des crimes de guerre ces derniers mois. Parmi ceux-ci figurent de la torture ou des violences sexuelles.

De son côté, l’Etat islamique (EI) a mené sa plus large offensive en trois ans en janvier autour d’une prison d’Hassaké. Cette situation montre le problème de «plus de 10’000 anciens combattants présumés» du groupe djihadiste ou de ses soutiens qui sont détenus sans recours légal, insiste un autre membre de la Commission, Hanny Megally.

Autre problème, les trois enquêteurs, après d’autres acteurs avant eux, s’inquiètent des dizaines de meurtres et des tensions armées dans les camps où sont retenus des proches de djihadistes, comme celui d’al-Hol. Des dizaines de milliers d’enfants se trouvent toujours sur ce site dans des conditions qui se détériorent. La Commission demande aux Etats qui soutiennent les parties au conflit suspectées de crimes internationaux d’arrêter de leur livrer des armes ou leur garantir un financement.

(ATS)

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