Un modèle pas si propre
Les eaux souterraines suisses sont polluées par les pesticides!

Au moins un dixième de la population suisse s'approvisionne en eau auprès de captages dont la protection n'est pas conforme à la législation. En conséquence, l'eau potable est souvent polluée par des résidus d'engrais et de pesticides.
Publié: 28.08.2024 à 19:03 heures
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Dernière mise à jour: 28.08.2024 à 19:13 heures
Salome Steiner, directrice d'Aqua Viva, met en garde: les valeurs de mesure des polluants dans les eaux souterraines sont «inacceptables».
Photo: zVg
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Helena Graf

Souvent considérée comme le château d'eau de l'Europe, la Suisse a tout pour une eau potable de qualité. «Nous avons les montagnes qui sont à l'origine du début du cycle de l'eau», explique Salome Steiner, directrice de l'organisation de protection des eaux Aqua Viva. Malheureusement, nous ne sommes pas à la hauteur de ces privilèges», coupe-t-elle.

Environ 80% des ménages suisses tirent leur eau des nappes phréatiques. L'Observatoire national des eaux souterraines (Naqua) contrôle régulièrement la qualité de celles-ci et constate que près de 15% des points de mesure présentent des valeurs de nitrates trop élevées. En d'autres termes, une quantité trop importante d'engrais s'est infiltrée dans la nappe phréatique à ces endroits.

Pollution sur le plateau

Salome Steiner d'Aqua Viva estime que les valeurs sont «inacceptables» et explique: «La pollution vient de nous, les hommes: routes, industrie, agriculture... plus nous utilisons une surface de manière intensive, plus cela devient problématique.»

Dans les régions où l'on cultive beaucoup de légumes, un point de mesure sur deux dépasse même les valeurs limites de nitrates. Les ménages du Plateau sont les plus touchés.

Les nitrates sont surtout dangereux pour les nourrissons. Les adultes ne présentent généralement pas de symptômes, même lorsque les valeurs limites sont dépassées. Mais outre les nitrates, des bactéries provenant des engrais ou des substances nocives provenant des pesticides se retrouvent dans les eaux souterraines.

Inquiétude quant aux substances de dégradation des pesticides

Le nitrate n'est toutefois pas le seul problème. Juliane Hollender est spécialiste en chimie environnementale à l'Institut suisse de recherche sur l'eau (Eawag). Elle explique à Blick: «Ce sont justement les produits de dégradation des pesticides, appelés métabolites, qui peuvent poser problème. Ils se retrouvent dans les eaux souterraines et ont longtemps été sous-estimés».

Selon Naqua, la concentration de ces produits de dégradation dans les eaux souterraines dépasse la valeur limite dans une station de mesure sur trois. Il est urgent d'agir, alerte la spécialiste. 

Car tant les nitrates que les métabolites des pesticides restent longtemps dans l'eau. «Même si nous améliorons la situation maintenant, nous ne nous en rendrons compte que dans 5, 10 ou même 20 ans», affirme Juliane Hollender.

Mais par où commencer? L'ordonnance suisse sur la protection des eaux de 1996 devait empêcher les polluants de pénétrer dans les captages d'eau souterraine et donc dans l'eau potable. Selon la loi, les cantons doivent délimiter des zones de protection dans lesquelles l'industrie et l'agriculture sont soumises à des interdictions claires.

Mais il existe encore des zones de protection trop petites. Les dispositions ne s'y appliquent pas parce que les formalités juridiques ont traîné pendant des années. 10% des ménages suisses tirent leur eau de telles sources.

Pas de sanctions en cas d'infraction

Salome Steiner d'Aqua Viva confirme: «Nous sommes très en retard dans la mise en œuvre du règlement.» Selon elle, cela s'explique notamment par le fait qu'aucune sanction n'est prévue si les dispositions de protection ne sont pas appliquées.

Il y a plus de trois ans, la population suisse a rejeté l'initiative sur l'eau potable. Celle-ci demandait de supprimer les subventions aux agriculteurs s'ils devaient polluer l'eau potable. L'Union des paysans prévoyait des conséquences désastreuses pour l'agriculture suisse et l'offre alimentaire nationale.

La directrice d'Aqua-Viva, Salome Steiner, espère une plus grande prise de conscience de la population. «Nous avons un long chemin à parcourir - et nous devons maintenant nous y tenir. Nous ne nuisons pas seulement à la nature, mais aussi à nous-mêmes», conclut-elle.

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