Le Conseil fédéral suscite l'espoir
La Suisse va-t-elle assouplir sa politique d'asile pour les déserteurs russes?

Les objecteurs de conscience russes fuient massivement la guerre en Ukraine. En Suisse, ils avaient jusqu'à présent peu de chances d'obtenir une protection. Il semble que cela soit en train de changer.
Publié: 21.02.2023 à 16:01 heures
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Avec la première mobilisation partielle, environ 300'000 réservistes ont été convoqués par la Russie.
Photo: AFP
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Daniel Ballmer

Ils sont des dizaines de milliers à avoir quitté la Russie. La vague de départ a été particulièrement forte lorsque le président, Vladimir Poutine, a déclaré la mobilisation partielle en septembre dernier. Des hommes ont pris la fuite pour ne pas laisser leur vie sur le front ukrainien, ce qui leur a valu de se retrouver sous la menace de sanctions draconiennes.

Alors que l'Allemagne a été rapidement ouverte à l'accueil des déserteurs russes, Berne s'est montrée plus réticente. Certes, les Russes peuvent demander un visa à une ambassade suisse pour des raisons humanitaires. Mais leurs chances de succès sont faibles, car l'objection de conscience ne suffit pas comme motif d'asile. Si l'on en croit le Conseil fédéral, cela n'est pas près de changer.

Une chance d'acceptation provisoire

Même avec la nouvelle ministre de la Justice socialiste Élisabeth Baume-Schneider sur le dossier, le gouvernement n'a pas l'intention de changer quoi que ce soit à la pratique courante en matière d'asile. Si l'objectif d'une sanction encourue par un demandeur d'asile est de garantir l'obligation de servir, cela ne constitue pas un motif d'accueil pour le Conseil fédéral. Cela serait contraire à la Convention sur les réfugiés, souligne-t-il.

Ce n'est que lorsque la personne «est considérée comme un adversaire politique, qu'elle est punie de manière disproportionnée et traitée en violation des droits de l'homme» que cela est considéré comme une persécution pertinente dans l'optique d'un droit d'asile.

Le Conseil fédéral entrevoir tout de même de faire une concession: si des indices laissent penser qu'une personne devra très probablement commettre des crimes de guerre dans le cadre de ses obligations militaires, une admission provisoire pourrait éventuellement lui être accordée. Il y aurait ainsi de bonnes chances de pouvoir rester en Suisse au moins jusqu'à la fin de la guerre.

De nombreux indices de crimes de guerre

Pour la conseillère nationale zurichoise PS Céline Widmer, il y a du changement dans l'air. Depuis le début de la guerre, l'élue a déjà effectué plusieurs tentatives de faire adapter la loi sur l'asile. L'objection de conscience ne devrait ainsi plus être exclue comme motif d'asile «s'il existe une probabilité que la personne concernée doive participer à des crimes de guerre».

«Il semble que le Conseil fédéral ait lentement pris conscience du problème», déclare Céline Widmer. Les indices de crimes de guerre commis par les troupes russes en Ukraine sont nombreux. Pour la socialiste, il est donc choquant qu'en vertu de la loi actuelle sur l'asile, les personnes qui sont forcées à prendre part à de tels actes ne soient pas protégées en Suisse.

Une admission provisoire permettrait au moins d'empêcher que ces personnes soient renvoyées sur le front. Céline Widmer préfèrerait néanmoins une adaptation claire de la loi.

En Allemagne, par exemple, les règles sont différentes. La Cour européenne de justice a clairement établi en 2015 qu'un objecteur de conscience a le droit à l'asile si sa troupe doit commettre des crimes de guerre.

Les Russes ne se réfugient pas beaucoup en Suisse

Jusqu'à présent, aucun ressortissant russe n'a été renvoyé dans son pays après avoir fait valoir sa désertion ou son refus de servir, souligne le Conseil fédéral.

De plus, il n'y a pas eu non plus d'afflux de demandeurs d'asile russes en Suisse. Sur l'ensemble de l'année dernière, ils étaient 265, explique le Secrétariat d'État aux migrations (SEM) sur demande de Blick. Cela correspond à environ 1% de toutes les demandes d'asile.

Aucune augmentation n'a été constatée. Et le Conseil fédéral montre clairement qu'il a peu d'intérêt à changer cette situation en assouplissant activement les conditions d'asile.


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