Un tribunal de Madrid a décidé le 31 juillet dernier de classer sans suite le dossier en raison à la fois de la prescription des faits, et également en vertu de la loi d'amnistie de 1977, des arguments toujours invoqués par les magistrats pour ne pas poursuivre les faits, ni même ouvrir une enquête jusqu'à présent.
La victime, Julio Pacheco, 68 ans, avait été entendue par une juge en septembre 2023, une audition inédite puisque jusqu'ici toutes les tentatives des victimes de la dictature avaient échoué.
Quarante-huit ans après les faits, cet ancien imprimeur avait déposé plainte en février 2023 contre ses quatre tortionnaires présumés. La juge en charge du dossier avait, contrairement à de nombreux autres magistrats avant elle, admis cette plainte en raison de «la possible existence» de «crimes contre l'humanité et tortures» dans ce dossier.
Lors de son audition, qui s'était tenue à huis clos, était présent un membre du nouveau parquet spécialisé dans les droits humains et de la mémoire démocratique, créé par une récente loi phare du gouvernement de gauche afin de réhabiliter les victimes du franquisme.
Mais pour la juge, la «jurisprudence n'a pas changé après la promulgation» de cette loi.
«Très en colère»
Joint par l'AFP, le plaignant s'est dit «très en colère», même s'il était conscient des «faibles possibilités» que son dossier connaisse une suite judiciaire. Il a assuré qu'il épuiserait «tous les recours possibles» pour parvenir à ses fins.
Amnesty International a promis dans un communiqué de «continuer à se battre pour briser le mur de l'impunité, pour qu'il y ait des enquêtes, et que soient jugés les crimes contre l'humanité commis pendant le franquisme».
Membre d'une organisation étudiante antifranquiste, Julio Pacheco avait 19 ans quand il avait été arrêté à Madrid par la police secrète en août 1975, trois mois avant la mort du «Caudillo» qui dirigeait alors le pays d'une main de fer depuis sa victoire dans la Guerre civile (1936-1939). Torturé pendant plusieurs jours à la Direction générale de la sécurité sur la célèbre place de la Puerta del Sol, selon son témoignage, il avait été ensuite envoyé en prison, accusé de terrorisme.
La loi d'amnistie, pilier de la transition vers la démocratie après la mort de Franco le 20 novembre 1975, empêche de poursuivre tout délit politique commis durant la dictature par des opposants mais aussi par «les fonctionnaires et agents de maintien de l'ordre public».