La construction de cette barrière de 210 kilomètres a démarré mercredi sur les chapeaux de roues après l’annonce surprise du ministre polonais de la Défense Mariusz Blaszczak. Depuis, environ 500 mètres de barrière, composée de trois clôtures parallèles de barbelés en fil de rasoir, haute de 2,5 mètres et large de trois mètres, ont été construits près du village de Zerdziny où des camions militaires transportant le matériel se succèdent sur un chemin boueux le long de la frontière.
Perché sur un camion, un soldat enfonce, à l’aide d’un grand marteau, des poteaux en métal dans la terre mouillée par des averses passagères. Le bruit du marteau retentit à des centaines de mètres. Côté russe, une dense forêt de bouleaux ne laisse rien percevoir.
Selon Mariusz Blaszczak, cette construction intervient après «des informations inquiétantes» sur le lancement des vols reliant le Moyen-Orient et l’Afrique du nord avec Kaliningrad, information qui n’a pas pu être confirmée par l’AFP. L’opposition accuse, elle, le ministre de mener un jeu politique et de propagande destiné à faire augmenter la côte des conservateurs au pouvoir en perte de vitesse avant les élections législatives de l’année prochaine. Mariusz Blaszczak a balayé ces propos accusant ses opposants d’adopter «une position pro-russe».
Le régime de Minsk et la Russie orchestraient l'afflux de migrants
La Pologne s’est déjà dotée d’une barrière physique et électronique, haute de 5,5 mètres et longue de 186 kilomètres le long de sa frontière avec le Bélarus, allié de la Russie. Son coût est estimé à 350 millions d’euros.
Depuis l’été 2021, des milliers de migrants et de réfugiés, principalement originaires du Moyen-Orient, ont forcé ou tenté de traverser la frontière avec le Bélarus. Varsovie et l’Occident ont accusé le régime de Minsk d’orchestrer cet afflux avec son allié russe dans le cadre d’une attaque «hybride» destinée à déstabiliser la région et toute UE, accusation rejetée par le régime d’Alexandre Loukachenko.
La nouvelle barrière le long de l’enclave russe de Kaliningrad «est un élément supplémentaire qui nous aidera à protéger notre frontière, qui constitue également la frontière extérieure de l’UE, contre l’immigration illégale», déclare à l’AFP Miroslawa Aleksandrowicz, porte-parole des gardes-frontières de la région de Mazurie. «Dès l’année prochaine, la barrière doit être munie de caméras et de systèmes de détection de mouvement», ajoute-t-elle.
Pour le moment, la situation à la frontière est «stable»
Cette année, seuls 13 personnes ont tenté de rentrer en Pologne depuis Kaliningrad, dont quatre citoyens du Tadjikistan en septembre, selon elle. «On veut nous faire peur mais je pense que c’est exagéré», estime auprès de l’AFP Marzena Raczewicz, assise dans la cuisine de sa maison située à Lenkupie, à quelques kilomètres de Zerdziny et à 500 mètres de la frontière.
«La barrière sera toujours un élément supplémentaire de protection, elle ralentira l’immigration, même s’il ne se passe rien sur cette frontière pour l’instant. Nous vivons ici en toute tranquillité», déclare-t-elle à l’AFP Sa voisine, Joanna Kozlowska, d’une trentaine d’année, confirme: «Ici tout était calme et tranquille et je pense que cela restera comme ça», d’autant plus que les gardes-frontières patrouillent les environs plusieurs fois par jour. «Pour l’instant, seuls les sangliers passent en Pologne depuis Kaliningrad», ajoute-t-elle en riant.
A Zytkiejmy, un autre village de la région, Tadeusz Rydzewski, 72 ans, «soutient la construction de la barrière». «Si Poutine nous menace alors je trouve qu’il est nécessaire de la construire», dit-il à l’AFP.
(AFP)